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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 décembre 1859.

Si l’on pouvait d’avance juger des résultats du prochain congrès par l’effet qu’a produit dans les esprits la seule nouvelle des invitations expédiées aux puissances, il serait permis de concevoir de favorables pressentimens sur la destinée de cette délibération européenne. L’influence de la nouvelle sur l’opinion a été excellente. En même temps une impression rassurante se répandait : quelques faits apparens et des rumeurs très accréditées dissipaient les craintes qu’avait inspirées récemment l’état de nos rapports avec l’Angleterre, et donnaient à croire que, loin de tourner à l’aigreur, les dispositions des gouvernemens anglais et français inclinaient vers la bienveillance mutuelle, la bonne entente et l’action concertée. Il ne nous est guère possible d’établir maintenant la portée de ces faits ou le fondement de ces bruits. Parmi les faits, nous avons déjà signalé le plus saillant, la circulaire du ministre de l’intérieur, qui a modéré le zèle anti-anglais de la presse officieuse ; nous mentionnerons aussi la réponse satisfaisante du chef du cabinet de l’empereur à la démarche excentrique de quatre négocians de Liverpool, — braves gens bien dignes sans contredit de figurer parmi les hommes de bonne volonté à qui la paix a été promise à la naissance du Christ, mais dont l’acte insolite et un peu ridicule est taxé d’indiscrétion et presque de félonie par leurs trop sévères compatriotes. Le chapitre des bruits serait plus curieux peut-être, mais qui oserait, sans en avoir la mission, répéter publiquement des protestations verbales attribuées à de grands personnages ? Qui oserait surtout garantir la fidélité des échos multipliés et successifs par lesquels elles arrivent dans le monde politique ? Quoi qu’il en soit, deux aimables vertus, dont, pour notre part, nous subissons volontiers le charme, la foi et la patience, règnent pour le moment sur l’opinion. L’on croit et nous croyons à la bonne intelligence entre les gouvernemens de France et d’Angleterre ; l’on croit et nous croyons que l’on verra au congrès les effets de cet accord : muni de cette foi, l’on attend patiemment le congrès, sans vouloir scruter d’avance aucun des problèmes qu’il devra résou-