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Avec une ardente activité, les révoltés de Talca avaient construit des remparts et creusé des fossés. Ils étaient commandés par M. Juan Ramon Vallejo, homme d’un esprit résolu et énergique, qui, après avoir obtenu par la contrainte la coopération de plusieurs citoyens des plus importans en les obligeant à donner leurs noms pour une espèce de gouvernement provisoire, leur avait imposé en outre, ainsi qu’à d’autres personnes considérables par leur fortune, des subventions onéreuses pour les frais de la guerre. Aucun habitant ne pouvait quitter la ville sans avoir payé une somme dont l’importance variait arbitrairement suivant la position de ceux qui émigraient. La nécessité suprême aux yeux du gouvernement était de réprimer d’abord cette révolte : ne prêtant que peu d’attention à celle de Copiapo pour ne pas trop diviser ses forces, il organisa une forte expédition sous le commandement du ministre de la guerre, le général Garcia, et le siège fut mis devant Talca.

Cependant les provinces du sud ne répondaient pas, comme on avait lieu de le craindre, à l’appel des révolutionnaires. Des bandes de montagnards sans plan et sans entente, commandées par des chefs obscurs, et entraînant à leur suite par l’appât du désordre des vauriens et des malfaiteurs, voilà le seul élément de guerre que l’on parvenait à remuer. Les forces locales étaient plus que suffisantes pour disperser ces bandes partout où elles se présentaient ; leurs attaques étaient moins inquiétantes pour l’autorité que pour les propriétaires et les citoyens pacifiques qui ne sympathisaient pas avec leur cause. Cet état de choses, quoique très regrettable, ne présentait pas les dangers d’une lutte en règle ; le général Garcia s’appliquait à retarder l’assaut de Talca, dans l’espoir que les insurgés, ayant conscience de leur isolement, finiraient par céder sans effusion de sang. Ses calculs furent justifiés par le fait. Le 22 février, la ville fut évacuée, et sa garnison, composée d’environ quinze cents hommes, se dispersa. On n’avait échangé que quelques coups de fusil dans cette apparence de siège ; mais une des premières victimes avait été le promoteur du mouvement, M. Ramon Vallejo, dont la mort contribua pour beaucoup à décourager les assiégés.

Pendant que ce résultat était atteint, l’insurrection éclatait dans divers endroits pour être aussitôt vaincue. Le 8 février, un gros peloton de montagnards, commandé par M. Juan Alemparte, entrait dans la ville de Concepcion en mettant aux premiers rangs, pour leur servir de rempart, quelques employés de l’administration qui avaient été faits prisonniers à Talcahuano. La ville n’était gardée que par très peu de troupes ; mais, au moment où la lutte commençait à prendre un caractère sérieux, un renfort envoyé par l’intendant du Nubie, la province limitrophe, vint seconder les défenseurs