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LE
CHILI EN 1859



I. — DEVELOPPEMENT DE LA SOCIETE CHILIENNE.


Lorsqu’on apprit en Europe, vers la fin de l’année dernière, que des troubles sérieux venaient d’éclater au Chili, un sentiment de tristesse se répandit parmi les hommes qui observent d’assez haut les faits politiques pour en saisir L’ensemble et comprendre la solidarité qui existe entre les nations. Depuis plusieurs années, on n’avait reçu du Chili que des nouvelles favorables en ce qui touche le gouvernement, la sécurité publique, le progrès intellectuel, le commerce, les finances, le crédit ; on se plaisait à considérer ce pays comme une république modèle, appelée à donner l’exemple aux états voisins et à former quelque jour une fédération hispano-américaine, sans laquelle les races latines du Nouveau-Monde résisteront difficilement à l’ambition des États-Unis. Cette bonne impression, il faut le reconnaître, vient de recevoir une atteinte grave. La crise récente n’a été révélée à l’Europe que par des lambeaux de. correspondances, des nouvelles succinctes, incohérentes, passant d’un journal à l’autre sans examen, et ajoutant quelquefois par malveillance une teinte sinistre à ce que les faits ont d’affligeant par eux-mêmes. Il est donc bon de rappeler à l’ancien monde qu’entre toutes les colonies espagnoles émancipées, le Chili conserve une place à part ; on va voir qu’il n’a pas été atteint dans les sources de sa prospérité, et que la surexcitation politique dont il souffre en ce moment n’est pas d’un caractère inquiétant pour l’avenir.