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La troisième région agricole, celle des plaines basses, est le pays de la terre fertile et des grandes propriétés. Situées le long du Pô, ces plaines sont en grande partie irriguées par les rivières qui, descendant des hauteurs, se jettent dans le fleuve principal. 427,200 hectares sont fertilisés ainsi par les eaux du Tessin, de l’Adda, du Brembo, du Serio, de l’Oglio, du Clisio et du Mincio, distribuées au loin par un immense réseau de canaux grands et petits, ouvrage des anciens et des municipalités du moyen âge. Les lois et les usages qui règlent la distribution des eaux forment un code complet, parfaitement conçu, et qui a eu pour effet de développer singulièrement l’esprit d’association. Les terres arrosées acquièrent sous l’influence du soleil une fécondité prodigieuse, et elles sont surtout occupées par des prairies et des rizières. Les prairies ordinaires, qui ne sont irriguées que pendant l’été, donnent trois ou quatre coupes d’excellent foin et un abondant regain. Les marcite, qui sont irriguées même l’hiver, donnent de cinq à six coupes ; celles qui sont fécondées par les eaux de la Vettabia, provenant en partie des égouts de Milan, se fauchent jusqu’à huit et neuf fois par an. Ces marcite se louent de 300 à 600 lire l’hectare. La graminée qui fait le fond de ces merveilleuses prairies est le ray grass.

Les rizières donnent aussi un produit considérable, qui, dans une bonne année et dans une bonne terre, peut s’élever à 110 hectolitres par hectare de riz non mondé, ou à une quarantaine d’hectolitres de riz mondé, représentant une valeur en argent d’à peu près 1,200 francs. Pour avoir la moyenne, il faudrait réduire ce résultat d’un tiers, et il est à noter aussi que les frais de cette culture sont très grands. Partout où il y a des rizières et des prairies irriguées, les terres labourées sont d’une importance secondaire ; elles n’occupent guère qu’un tiers et parfois un cinquième de la superficie des exploitations. Les prairies artificielles prennent une grande place dans les rotations ordinaires. Sur un assolement de six ou sept années, les plantes fourragères occupent le sol pendant trois ou quatre ans. On sème le trèfle ordinaire avec le froment ; on le fait pâturer à l’automne, et on le fauche l’an d’après[1].

Les autres produits de la région des basses plaines sont en première ligne le maïs, puis le froment, le seigle, l’avoine, le colza, le millet. On estime le rendement du froment de 16 à 17 hectolitres, et celui du maïs de 30 à 42 hectolitres à l’hectare[2]. Dans le Lodigiano

  1. On le remplace parfois par le trèfle blanc trifolium repens, ladino en italien et avec avantage, parce que cette légumineuse, étant tout à fait indigène et vivace, permet de maintenir les prairies temporaires plus longtemps qu’avec le trèfle ordinaire.
  2. D’après les calculs faits avec le plus de soin, le produit moyen du froment en ces dernières années est pour l’Angleterre de 24 hectolitres, pour la Belgique de 22, pour la Saxe de 18 à 19 hectolitres, pour la France de 10 à 12 hectolitres l’hectare.