de galets, souvent inondée par les marées de vive eau, toujours humide et spongieuse, elle infectait le voisinage des miasmes exhalés de son sein. Sous le règne de François Ier, le nombre des épidémies se comptait au Havre par celui des années. Henri II fit paver la ville en 1548, et le foyer d’infection fut de la sorte éloigné du seuil des habitations ; mais un grand mal persistait : c’était l’insuffisance des eaux potables. Les sources amenées trente ans auparavant par François Ier n’avaient point augmenté avec le progrès de la population ; loin de là, les conduites s’étaient détériorées. M. de La Mailleraye, commandant de la ville, les fit réparer en 1553, et tira tout le parti possible des faibles ressources locales ; on ne tarda point à voir combien elles étaient indispensables. L’amiral de Coligny avait pris en 1561 possession du gouvernement du Havre, dont il était titulaire depuis huit ans. L’année suivante, les protestans s’emparèrent de la place et la livrèrent aux Anglais, qui l’occupèrent avec une forte garnison. Le maréchal de Cossé-Brissac, chargé de la reprendre, fit couper, au mois de juillet 1563, toutes les conduites d’eau, et les Anglais perdirent en quinze jours la moitié de leur monde par les maladies. Que ne dut pas souffrir la population civile ! Profitant de cette leçon, l’amiral de Villars fit faire en 1581 des citernes sous tous les édifices publics. Enfin, en 1669, le frère Constance, capucin, qui était le Paramelle de son temps, fut envoyé au Havre par Colbert, et la population actuelle jouit, sans grand souvenir de lui, des sources dont il fit la découverte.
La rareté de l’eau douce et les exhalaisons de la plaine de Leure n’étaient pas les seules causes de l’insalubrité du Havre. En cette même année 1669, une affreuse épidémie avait ravagé la ville de Rouen, et de larges mesures d’assainissement avaient été prises pour en prévenir le retour. Deux ans après, des maux semblables réclamèrent au Havre des remèdes analogues. M. de La Galissonnière, intendant de la province, prescrivit un nettoiement général de la ville, et voulut s’assurer par lui-même de la manière dont il s’exécutait. Surpris de la propreté inaccoutumée des rues principales, il se dirigea vers les quartiers pauvres, et il ne s’expliqua l’énorme accumulation sur le rempart d’objets repoussans qui blessait son odorat qu’en apprenant que la pièce appelée par les Anglais the best room in the house était au Havre un luxe tout à fait exceptionnel. Ce luxe étant à ses yeux une nécessité, il prétendit l’imposer à toutes les maisons ; mais cette innovation causa un tel soulèvement, qu’il fut contraint d’y renoncer. Confiant alors dans l’efficacité des dérivatifs, il fit établir des latrines publiques d’une élégance particulière aux lieux que désignaient pour cet usage les prédilections de la population. Vain espoir : l’entêtement à repousser les innovations de M. de La