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à une organisation plus élevée que ceux des mers tropicales. Les espèces dont le type offre sous la zone arctique un organisme supérieur s’abâtardissent à mesure que l’on se rapproche des tropiques. Dans les mers glaciales, là où les eaux ont une transparence parfaite, on rencontre souvent des espaces de 20 à 30 milles marins carrés et d’une profondeur de plus de 500 mètres, où les animalcules fourmillent à ce point que Scoresby estime qu’il ne faudrait pas moins de 5,000 ans à 20,000 personnes pour compter ceux que renferment seulement 2kilom.,50 d’eau. Ainsi donc vers les pôles tandis que la vie abandonne les continens, elle n’en devient que plus luxuriante au sein des mers. D’une température plus chaude et plus uniforme que les terres, les eaux marines présentent aux animaux des conditions plus favorables de développement.

Quand on considère l’ensemble des types dont se compose le règne animal, on reconnaît qu’ils peuvent se répartir à peu près en deux classes, les types tropicaux et les types subpolaires. La zone torride et la zone tempérée froide s’offrent donc comme les pôles de la faune du globe, et les caractères qu’elles entraînent prédominent tour à tour dans chaque pays, selon sa température spéciale. Il ne faut pas croire cependant que les genres et les espèces se conservent toujours avec une pureté de traits qui permette de reconnaître leur origine subpolaire ou tropicale. Les animaux des régions intermédiaires présentent aussi leurs caractères propres, et plusieurs espèces ne se rencontrent même que dans telle ou telle région moyenne. Cela tient à ce que les types s’abâtardissent et s’altèrent, quand ils s’éloignent des lieux pour lesquels ils paraissent avoir été créés. Les genres tropicaux dégénèrent lorsqu’ils s’avancent vers le nord ou vers le pôle austral ; les genres propres aux contrées boréales ou australes dégénèrent à leur tour quand ils se rapprochent des tropiques. Et ce fait, sur lequel nous voudrions appeler l’attention, permet souvent de reconnaître à laquelle des deux régions opposées on doit rapporter la naissance de certains animaux. Si, comme tout le fait supposer, l’espèce humaine est une dans son organisation, on doit conclure de son abâtardissement dans les régions équatoriales et polaires qu’elle a pris naissance dans une contrée tempérée, d’où elle s’est répandue suivant deux directions opposées. L’homme appartiendrait dans ce cas à la catégorie des types subpolaires, à la différence des singes, qu’il faut incontestablement classer parmi les types tropicaux.

Les variations que subissent les types zoologiques en s’éloignant du lieu de leur origine déterminent l’apparition d’espèces intermédiaires qui se modifient incessamment d’après les conditions spéciales où elles se développent. Aussi des contrées voisines n’offrent-elles jamais