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Notre personnel d’officiers est donc effectivement de 1,563 contre 5,000 environ, que portent les listes de l’amirauté anglaise. On voit déjà combien cet écart est grand, et dans quelles conditions d’infériorité il nous laisse ; on s’en assure mieux en suivant sur nos flottes la répartition de ce corps d’officiers dans l’hypothèse d’un armement complet.

Il est évident que, pour un service de guerre, il faudrait d’abord armer tous les bâtimens à vapeur à flot capables : 1° de présenter le flanc à l’ennemi, 2° de poursuivre comme croiseurs les bâtimens de commerce, 3° de porter des vivres, des munitions, des troupes, dans nos colonies, ou d’accompagner comme transports une flotte de guerre en vue d’une expédition ou d’un débarquement, 4°de défendre les.ports de commerce ou de guerre les plus importans ou les places dépourvues de batteries et de défenses fixes.

Il faudrait en outre armer en flûtes les quelques vaisseaux à voile qui nous restent, et dont, sous cette forme, on obtiendrai de bons services, en les amalgamant dans une flotte de transport, et sauf à les faire remorquer quand cela serait nécessaire. Pour les frégates et les grandes corvettes à voile, bâtimens d’une marche supérieure, leur destination est d’avance indiquée : elles iraient dans les mers lointaines, où le ravitaillement en charbon est impossible, faire un service de croiseurs dont la tradition est toujours vivante, et infliger au commerce ennemi des dommages auxquels il ne pourrait échapper. Sur nos 27 frégates à voile, 20 sont dans les meilleures conditions pour cet emploi, et toutes nos corvettes y sont propres. L’avantage de cette flotte, c’est sa prompte disponibilité ; tout bâtiment à flot peut être considéré comme un bâtiment armé. Le matériel est dans les magasins, et nos croiseurs à voile auraient pris le large avant que l’ennemi eût pu établir des croisières à vapeur pour leur barrer le chemin. Les bâtimens à voile inférieurs aux corvettes resteraient en dehors de cet armement.

Dans la flotte à vapeur, il faudrait également faire un choix. Pour les bâtimens à roues, il conviendrait de s’arrêter aux corvettes, quoique plusieurs avisos de première classe fussent bons à un service de transport. Parmi les bâtimens de flottille, on devrait mettre en ligne de compte les batteries flottantes, les canonnières et les chaloupes blindées, qui seraient utilement employées à la défense des côtes et des abords des rivières navigables.

Voici dès lors les trois divisions naturelles d’un armement complet : flotte de guerre, transports, croiseurs à voile. Il resterait en dehors de ces besoins : 1° le vaisseau-école de Brest, pépinière des aspirans ; 2° le vaisseau de matelots canonniers, où se forment les bons chefs de pièces ; 3° l’école des mousses de Brest, institution qui fournit d’excellens sujets, et où se recrutent les cadres des officiers mariniers et des sous-officiers ; 4° la flottille qui stationne dans l’intérieur des fleuves du Sénégal, et qu’en cas de guerre il conviendrait d’accroître plutôt que d’affaiblir.

L’ensemble comporterait la présence de 15 officiers-généraux à la mer, avec un chef d’état-major et deux aides-de-camp pour chacun. En y ajoutant le personnel nécessaire au service des ports de guerre, réduit aux termes les plus stricts, et sans y comprendre les officiers supérieurs qui font partie des commissions de recette, on a tous les élémens du tableau qui suit, et où les officiers sont répartis dans les proportions que comporte chaque nature de service.