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Vénétie, tout en demeurant sous la domination de l’Autriche, est englobée dans la future confédération italienne. Or, si la constitution de cette confédération présente au point de vue politique d’immenses difficultés, elle peut, à ce qu’il semble, être essayée avec succès en ce qui concerne l’intérêt économique et commercial. Le plan d’une union douanière italienne est très praticable; il a déjà été plusieurs fois tenté, et il n’a échoué que devant des obstacles politiques qui n’existent plus aujourd’hui. Lors même qu’ils ne seraient pas rattachés les uns aux autres par un lien fédéral, les divers états de l’Italie auraient tout avantage à adopter, pour leurs relations commerciales et maritimes, une législation uniforme; à plus forte raison, sous la constitution qui est projetée pour eux, devront-ils pratiquer ce système. Si donc l’association de douanes se réalise, il est probable que la Vénétie y sera comprise, non-seulement en sa qualité de contrée italienne, mais encore à raison de ses anciens rapports avec la Lombardie, rapports qu’il ne serait ni politique ni équitable de gêner par l’intervention d’un tarif. Dans cette hypothèse, comment serait organisé le régime des échanges entre la Vénétie et les provinces autrichiennes? Laisserait-on la Vénétie en dehors des limites douanières de la monarchie pour ne plus la considérer que comme pays étranger? Ce serait créer de graves mécontentemens, et le gouvernement autrichien, qui a récemment supprimé les douanes intérieures de la Hongrie et de la Dalmatie, ne songera sans doute pas à établir des barrières de tarifs aux frontières de la Vénétie. D’un autre côté, maintenir la franchise complète des échanges entre la Vénétie et les provinces autrichiennes alors que la première fera partie de l’union douanière de l’Italie, ce serait altérer profondément le régime économique de l’empire en ouvrant une large porte aux produits étrangers, à l’endroit desquels le tarif italien serait plus libéral. De quelque manière qu’on envisage la question, l’on aperçoit une série de complications très sérieuses; le problème commercial que la convention de Villafranca vient de poser à l’administration autrichienne semble bien difficile à résoudre, et, tant qu’il ne sera pas résolu, le cabinet de Berlin y puisera d’excellentes raisons pour combattre l’accession de l’Autriche au Zollverein.

Enfin, dans cette lutte d’influences, la Prusse est soutenue par un parti politique dont la puissance au-delà du Rhin ne cesse de grandir; elle a pour elle le parti libéral. Depuis 1847, date de l’établissement du régime constitutionnel, la Prusse tient en Allemagne le drapeau du libéralisme. Ce régime a résisté aux orages populaires de 1848, il résiste aujourd’hui avec succès aux derniers efforts de la féodalité expirante. Alors que des parlemens plus anciens et plus illustres disparaissaient ailleurs sous le coup des révolutions, le par-