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pour prendre sa revanche. Sans se laisser décourager par le succès que venait de remporter la Prusse, le prince Schwarzenberg invita de son côté les états du Zollverein à envoyer à Vienne des représentans pour y tenir une sorte de conférence libre où seraient examinées les bases de l’union austro-allemande. Plusieurs états, et à leur tête la Prusse, refusèrent de répondre à cet appel; mais la Bavière, la Saxe, le Wurtemberg, Bade, la Hesse électorale, la Hesse grand- ducale, Nassau et la Hesse-Hombourg, qui déjà, lors des discussions précédentes, avaient fortement incliné vers l’Autriche, nommèrent avec empressement des commissaires, de telle sorte que la conférence de Vienne pouvait être considérée comme représentant, par le nombre et par l’importance des états qui y figuraient, une fraction notable du Zollverein. Dans cette réunion, que dirigèrent par le fait le prince Schwarzenberg et le comte Buol après la mort de cet habile ministre, l’admission de l’Autriche dans l’association allemande fut convenue en principe; seulement on reconnaissait qu’elle devait être précédée d’un traité de commerce exécutoire à dater de 1854, afin de préparer de part et d’autre la fusion complète ajournée au plus tard à 1859. De plus, indisposés par l’attitude de la Prusse, qui persistait à écarter des délibérations relatives à la reconstitution du Zollverein les propositions de l’Autriche, la plupart des états qui avaient envoyé des commissaires à Vienne conclurent à Darmstadt, le 6 avril 1852, des conventions, demeurées quelque temps secrètes, par lesquelles ils s’engageaient à soutenir par tous les moyens la cause de l’union austro-allemande. Ce fut dans ces circonstances que s’ouvrirent à Berlin, le 19 avril suivant, les discussions de la conférence régulière du Zollverein.

Il arriva ce qu’on pouvait prévoir : des divergences d’opinion se manifestèrent dès le premier jour au sein de la conférence. Des récriminations échangées entre la Pusse et les coalisés de Darmstadt, des projets et des contre-projets incessamment jetés au milieu des débats n’eurent pour effet que d’y augmenter la confusion. L’assemblée se sépara sans rien résoudre. Les gouvernemens s’adressèrent mutuellement notes sur notes; mais l’accord semblait plus impossible que jamais. C’était la Prusse et l’Autriche qui tenaient tous les fils de ces négociations, où s’agitait, pour l’une comme pour l’autre, une question politique bien autrement grave que l’intérêt commercial. Déjà l’on désespérait du Zollverein; on calculait le préjudice que causerait à l’Allemagne tout entière cette fatale lutte d’influences; les esprits libéraux, les âmes allemandes, voyaient sombrer avec douleur l’institution qui, la première, avait arboré avec succès le drapeau de l’unité germanique. Tout à coup, vers le milieu de l’automne, les esprits se calmèrent; le roi de Prusse et l’empereur d’Autriche eurent une entrevue, les deux cabinets, naguère si hos-