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secondaires, on devait s’y attendre, s’émeuvent à leur tour et s’agitent mystérieusement. La Saxe, la Bavière et le Wurtemberg viennent de concerter une conduite commune sous Tinspiration du ministre saxon, M. de Beust. Les trois royaumes, quoique redoutant une réforme populaire dans le sens unitaire, veulent aussi changer ù leur façon le mécanisme de la confédération. M. de Beust poursuit depuis 1850, d’accord avec la Bavière, une politique qui tendrait à réunir en faisceau les états secondaires et —à leur donner dans la diète une représentation compacte et une autorité telles qu’ils y formeraient à côté de la Prusse et de l’Auti-iche une troisième puissance égale à chacune des deux autres. Pendant la guerre d’Orient, et cette année même pendant la crise italienne, M. de Beust avait dirigé ses efforts vers ce but, et n’avait pas pu l’atteindre. Sera-t-il plus heureux cette fois ? Obtiendra-t-il, à la faveur des embarras de l’Autriche, que cette puissance se résigne au grand rôle rêvé par les états secondaires ? Et unis à l’Autriche, les états secondaires espèrent-ils vaincre les aspirations nationales de leurs propres sujets et résister aux tentations ambitieuses de la Prusse ? Nous verrons. En tout cas, les luttes d’intérêts vont se rallumer avec chaleur au sein de la confédération, et l’année parlementaire et politique qui va s’ouvrir sera féconde en controverses diplomatiques et en discussions. N’omettons point, en attendant la réunion des parlemens allemands, de mentionner l’ouverture de la session qui vient d’avoir lieu dans la calme Hollande. L’un des travaux les plus intéressans qui aient été annoncés au début de cette session présente ce caractère d’utilité pratique et de tranquille audace qui distingue les entreprises néerlandaises : nous voulons parler du percement des dunes, œuvre grandiose qui doit fournir à Amsterdam une voie maritime plus courte et plus facile, et lui conserver son rang parmi les premiers ports de commerce.

Au milievi d’une paix politique qui se prolonge heureusement, et qui tient peut-être encore plus à la lassitude qu’à la force des situations, l’Espagne se préoccupe de deux affaires qui mettent en jeu ses intérêts les plus divers et les plus élevés, et qui peuvent n’être point sans conséquences. L’hspagne, on le sait, a sur la côte du Maroc quelques possessions, derniers restes de sa puissance d’autrefois, de ses conquêtes dans le nord de l’Afrique, et qui sont au-delà du détroit une faible compensation de la perte de Gibraltar ; elle a une petite garnison à Ceuta. Depuis bien des années, ces possessions sont incessamment exposées aux insultes des Maures. Ces agressions se sont renouvelées récemment, et ont pris même un caractère plus grave. Il y a eu d’assez vifs combats entre la garnison de Ceuta et les bandes indisciplinées qui l’ont assaillie. De là pour le cabinet de Madrid l’obligation de songer à sauvegarder la sécurité des possessions de l’Espagne, l’honneur de ses armes, et le ministère s’est disposé à envoyer des troupes, il a préparé une véritable expédition. Ce n’est pas la France, maîtresse de l’Algérie et exposée elle-même en ce moment sur sa frontière de l’ouest à de semblables insultes des populations marocaines, qui peut voir d’un œil jaloux l’i spagne inlliger un châtiment à la barbarie africaine, fût-ce au détriment du Maroc. L’Europe et l’intérêt général de la civilisation ne pourraient que gagner à une répression efficace de cette piraterie organisée. C’est le malheur de l’Angleterre d’être un peu moins intéressée à voir s’établir fortement, s’é-