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fait se révélait dans toutes ces luttes : les partis napolitains étaient impuissans par eux-mêmes à changer la direction du règne et à vaincre la pensée d’absolutisme qui restait maîtresse ; mais c’était le moment où tout changeait de face en Italie et où un souffle inattendu renouvelait la politique. Le pontificat de Pie IX commençait par des amnisties et des promesses libérales ; la Toscane entrait dans une voie d’améliorations intérieures ; le Piémont était prêt à suivre le mouvement sous la mystérieuse impulsion de Charles-Albert. Ce n’était plus la pensée révolutionnaire qui enflammait l’Italie, c’était une pensée de réforme régulière, devenue réalisable par l’accord des princes et des peuples, qui semblaient s’unir dans un même sentiment. La presse politique commençait à naître à Florence, à Livourne, à Bologne, à Rome même. À ce moment, le pouvoir absolu reculait sur tous les points en Italie, excepté à Naples. Chose remarquable, tandis que le pape, le grand-duc de Toscane, le roi de Sardaigne, prenaient eux-mêmes l’initiative des réformes, le roi Ferdinand résistait plus que jamais, surpris et presque irrité de cette pacifique agitation qui remplissait une partie de la péninsule. Il voyait d’un œil défiant la pensée mal dissimulée de Charles-Albert, et il traitait le pape comme un révolutionnaire de plus. Une censure jalouse gardait les frontières et cherchait à arrêter au passage le bruit des événemens qui passionnaient les autres contrées de l’Italie. C’était à ce point qu’on interdisait à Naples la publication des amnisties de Pie IX, dont les familiers du palais affectaient de représenter les généreuses mesures comme les actes d’un fou et d’un mystique de libéralisme. Au moment où le pape était acclamé partout, en Italie et en Europe, c’était un délit à Naples d’avoir des médailles qui représentaient son image.

Soucieux et défiant de tout, Ferdinand II n’avait qu’une pensée, celle de clore son royaume et de tout comprimer à l’intérieur. Il allait même jusqu’à ne plus permettre à son frère, au comte de Syracuse, de réunir autour de lui une société jeune et hardie dont la liberté d’allures ressemblait à de l’opposition. Les plus timides conseils de concessions à la force des choses eussent été mal venus. Un jour, le ministère où le roi avait fait entrer des hommes qui n’avaient assurément rien de commun avec le libéralisme, MM. Parisio, Spinelli, d’Urso, ce ministère s’émut au spectacle des agitations toujours croissantes de l’Italie du nord et du centre, et quelques-uns de ses membres, redoutant un contre-coup violent et fatal dans le royaume, eurent l’idée de proposer quelque inoffensive modification dans le gouvernement. Le difficile était de parler au roi. Ce fut le plus hardi, M. Spinelli, depuis longtemps connu du roi, qui se chargea de cette délicate ouverture, et il devait être appuyé par ses collègues. Le