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elles contribuent, par les centimes additionnels dont elles sont frappées au prorata du chiffre de la contribution foncière, à l’entretien des chemins vicinaux, et cependant, lorsqu’elles veulent utiliser ces chemins pour le transport des bois, elles doivent payer à part les dégradations qui peuvent en résulter. La production moyenne de l’hectare boisé n’est cependant pas supérieure en poids à celle de toute autre culture : elle ne dépasse guère 2,500 ou 3,000 kilogrammes, tandis que celle de l’hectare cultivé peut s’élever à 4,000 kilogrammes et au-delà pour le froment, en y comprenant la paille, et à 4,500 kilogrammes s’il s’agit de pommes de terre. Le nombre de colliers qu’exigent ces cultures pour la fumure, le labour, la moisson, est en outre beaucoup plus considérable que celui que demande le simple transport de la production ligneuse de l’hectare de bois. Si donc les impôts spéciaux affectés à l’entretien des chemins vicinaux sont suffisans pour cet objet quand il s’agit de terres arables, à plus forte raison devrait-il en être de même pour les forêts, et si leur viabilité ne peut être assurée que par des réparations extraordinaires, on a peine à comprendre qu’on les laisse exclusivement à la charge de ces dernières quand les premières présentent des causes de dégradation beaucoup plus sérieuses. Qu’on ajoute aux conditions d’infériorité que nous venons d’énumérer l’élévation des tarifs de navigation et l’exagération des droits d’octroi à l’égard de la matière ligneuse, et l’on comprendra que, si l’ignorance et l’imprévoyance sont les causes premières de la disparition des forêts communales ou domaniales, c’est à l’insuffisance du revenu que donne la propriété boisée, due surtout à la législation qui la régit, qu’il faut en partie attribuer les défrichemens si nombreux aujourd’hui des forêts particulières. D’autres circonstances tendent cependant, comme on va le voir, à produire le même effet.


III

La France, on l’a dit souvent et l’on ne saurait trop le répéter, est un pays essentiellement agricole. Mieux partagée qu’aucun autre sous le rapport du sol et du climat, elle donne les produits les plus divers et possède le monopole de quelques-uns des plus précieux : telle est la vigne par exemple, car les vins qu’elle fournit laissent bien loin derrière eux ceux de toute autre contrée. Il semblerait que, dans des conditions aussi exceptionnelles, la nation eût dû