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piémontais. Dans tous les cas, ce n’est ni de la France ni du Piémont que peuvent venir des embarras pour le nouveau roi de Naples. Dans un pays de l’Italie, à Florence, une insurrection a éclaté, et il faut bien se rendre compte de la nature de ce mouvement, le plus pacifique et le plus simple des mouvemens. Ce n’est point une révolution primitivement dirigée contre la dynastie grand-ducale, et moins encore contre l’ordre public ; c’est une insurrection du sentiment patriotique pour attirer la Toscane dans l’alliance de la France et du Piémont. Le souverain toscan, qui est un archiduc, comme on sait, a hésité entre ses intérêts, les liens de famille et la politique nationale dont on lui soumettait le programme, et ici encore, on peut reconnaître comment l’intérêt autrichien se retrouve partout, est la clé de toute la politique dans ces petits pays. Le grand-duc est parti pour Vienne, et depuis ce moment, nous n’avons pas entendu dire que le désordre ait envahi la Toscane, que la démagogie gouverne Florence, où un commissaire piémontais a la direction des affaires pendant la guerre, sans que cela engage en rien l’avenir : d’où il suit qu’on peut être partisan de l’indépendance italienne et n’être pas un démagogue, que tous ceux que l’Autriche appelle des révolutionnaires, et qui le sont effectivement contre la domination impériale, ne le sont pas essentiellement contre tous les intérêts conservateurs des sociétés.

C’est ce principe des nationalités invoqué en faveur de l’Italie, c’est ce principe, dit-on, qui est révolutionnaire et menaçant. S’il prévalait, quel est l’état qui ne se sentirait atteint par la possibilité de quelque revendication de race ? Il en est du principe des nationalités comme de tous les principes : pris dans un sens absolu, ils aboutissent à des conséquences étranges. C’est ainsi que les partisans de l’Autriche demandent sérieusement si on donnera la Corse, Malte et même les Iles-Ioniennes à l’Italie, parce qu’on parle la langue italienne dans ces pays, et si l’Europe entière devra se réorganiser d’après ces idées. La question est plus simple heureusement, et on oublie que la politique n’est pas la philosophie. Il y a évidemment des assimilations ou des agrégations que les traités commencent par former peut-être, que le temps consacre, et qui finissent par entrer dans les plans de l’ordre général. En est-il de même lorsque cette juxtaposition de races diverses n’est qu’une domination obligée de s’imposer sans cesse, lorsque l’incompatibilité entre un pouvoir étranger et un peuple tout entier ne fait chaque jour que s’accroître ? C’est la situation réelle de l’Italie. Depuis quarante ans, qu’a gagné l’Autriche dans la Lombardo-Vénétie ? Elle sent son pouvoir moins assis et elle est moins sûre du lendemain que le premier jour. Dans les autres parties de l’empire, en Moravie, en Bohême, en Silésie et même en Hongrie, il y a un certain