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plusieurs éditions. Le troisième, Garsault, capitaine des haras et membre de l’Académie des Sciences, a laissé de nombreux écrits sur l’équitation et l’hippiatrique, notamment le Guide du Cavalier et le Parfait Maréchal, traités classiques dans leur temps, et dont les dernières éditions ont paru au commencement de ce siècle.

Quant à M. de Palerne, trésorier-général du duc d’Orléans et secrétaire perpétuel, il tirait évidemment sa principale importance de sa place. Le nom d’un prince du sang se trouve de la sorte uni à la création de la société. Le duc d’Orléans d’alors, était le petit-fils du régent et le grand-père du roi Louis-Philippe ; après avoir fait la guerre avec bravoure et pris une part éclatante aux victoires de Fontenoy et de Laufeld, il vivait retiré à sa maison de campagne de Bagnolet, dans l’intimité de quelques amis. Il aimait les lettres, les arts et les sciences. En 1756, il avait fait venir de Genève le fameux Tronchin pour inoculer son fils et sa fille, hardi et généreux témoignage en faveur d’une innovation très contestée. L’apanage d’Orléans étant considérable, un administrateur de ces biens ne pouvait que manier de grands intérêts agricoles.

L’arrêt du conseil qui instituait la société avait été rendu sur le rapport du contrôleur-général des finances Bertin, un des meilleurs ministres de Louis XV :

Bertin, qui dans son roi voit toujours sa patrie,
Prête un bras secourable à ta noble industrie,


dit encore Voltaire dans son Epître sur l’agriculture.

La première séance se tint à Paris, le 12 mars 1761, chez ; l’intendant de la généralité. Sur le procès-verbal qui constate le nom des présens, la signature du prince de Tingry se trouve à côté de celle du jardinier Pépin. Un des premiers soins de la compagnie fut de se choisir ce qu’on appelait des associés ou membres libres ; on y remarque Duhamel du Monceau, qui était alors dans tout l’éclat de sa réputation ; Buffon, de Jussieu, membres comme Duhamel de l’Académie des Sciences ; l’intendant des finances Trudaine, dont Voltaire a, dit dans la même épître :

Trudaine sait assez que le cultivateur
Des ressorts de l’état est le premier moteur,
Et qu’on ne doit pas moins, pour le soutien du trône,
À la faux de Cérès qu’au sabre de Bellone.

Ces vers seraient aujourd’hui un lieu-commun, il n’en était pas tout à fait de même alors ; le sabre de Bellone passait depuis longtemps bien avant la faux de Cérès, et on commençait seulement à se douter qu’il faudrait peut-être intervertir les rangs. À partir de ce