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par l’étude même de la croûte terrestre, et nous allons voir comment les géologues, en partant du globe, sont aussi ramenés à l’atmosphère.

À la température qui domine communément sur notre planète, l’eau est liquide, les minéraux sont solides ; mais c’est là un état transitoire dont la permanence n’est qu’apparente. Il n’existe que depuis la période, relativement fort courte, qui a commencé avec les conditions actuelles. Antérieurement elles ont pu être différentes, et le moindre accroissement, la moindre diminution de chaleur liquéfie ce qui nous semblait essentiellement solide, solidifie ce qui s’offre à nous avec un caractère ordinaire de fluidité. Plus on s’enfonce dans les profondeurs terrestres, plus on remarque que la température s’élève. Les observations ont établi que pour une profondeur de 32 mètres le thermomètre monte de 1 degré, en sorte qu’à la profondeur de 3 kilomètres on doit déjà rencontrer une chaleur égale à celle de l’eau bouillante ; à 20 kilomètres, la température doit être de 666 degrés, chaleur capable de tenir en fusion la plus grande partie des substances minérales connues. Donc vers le centre de notre globe, à 6, 386 kilomètres, règne l’incroyable température de 200, 000 degrés. Cette loi de progression dans la chaleur terrestre, qui n’est, bien entendu, qu’approximative, et qui doit varier en raison d’une foule de circonstances, prouve que le noyau terrestre est dans un état constant de fusion. Les couches solides dont se compose l’écorce de la terre passent ainsi par degrés de la solidification complète à une demi-fluidité, pour arriver ensuite à un état encore plus fluide. Les phénomènes volcaniques nous confirment d’autre part la réalité d’un noyau bouillonnant et en fusion, puisque les cratères ne sont que de vastes soupiraux par lesquels s’échappe une partie de la matière centrale, au sein de laquelle se développe, avec une énergie considérable, la force élastique des gaz.

La forme que présente notre planète, et que la géodésie, l’astronomie ont déterminée, corrobore le fait de sa fluidité primordiale. Une masse fluide, dont les diverses parties s’attirent réciproquement, tend, en vertu de ces attractions mutuelles, à prendre la forme sphérique. On en a la preuve par les gouttes de pluie dans lesquelles se réfléchit la lumière solaire en donnant naissance à l’arc-en-ciel, dans les plombs de chasse qu’on fabrique en laissant tomber d’une grande hauteur du plomb fondu ; ce plomb se solidifie pendant sa chute et prend la forme de petites boules. La sphéricité de la terre s’accorde donc avec l’hypothèse d’une fluidité primitive ; seulement le mouvement de rotation dont la planète était animée n’a pas dû lui permettre de garder cette forme régulière. Chaque molécule éprouvant l’action d’une force centrifuge par suite du mouvement