Page:Revue des Deux Mondes - 1859 - tome 21.djvu/341

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

viennent trop complexes, trop nombreux pour être analysés, et alors il est sage de s’arrêter en confessant notre ignorance.

Un premier fait nous frappe dans l’étude de la terre : c’est l’existence de la masse d’air dont elle est environnée. Ce n’est pas accidentellement que l’atmosphère existe et qu’elle entretient chez les êtres animés le mouvement et la vie. L’atmosphère, qui apparaît comme une expansion de notre planète, a pourtant un tout autre caractère. Elle n’est pas uniquement composée d’air, c’est-à-dire d’un gaz né d’un mélange en proportions définies d’oxygène et d’azote; elle contient aussi de l’eau, qui est un composé où l’oxygène s’associe à l’hydrogène. Cet air et l’eau qui y est renfermée à l’état de vapeur agissent continuellement sur le sol, sur les matières inorganiques et organiques. L’atmosphère se trouve ainsi dans une relation de tous les instans avec l’écorce terrestre, dont elle n’a pu s’échapper. C’est en réalité une partie intégrante de la planète que nous habitons, et l’on n’y saurait voir une masse complètement distincte du globe. En effet, une portion de celui-ci est liquide, puisque l’Océan occupe plus de la moitié de la surface terrestre, et qu’une foule de rivières arrosent les continens; cette énorme masse liquide trouve dans l’atmosphère son perpétuel réservoir. Le moindre refroidissement suffit pour que l’eau vaporisée auparavant se précipite sur la croûte terrestre, d’où elle remonte ensuite dans l’atmosphère sous forme de vapeur. Aucun corps ne se soustrait à l’action de l’air et de l’eau, ou plutôt de l’oxygène que ces deux principes renferment. S’il est quelques métaux qui résistent un temps fort long à leur influence, le plus grand nombre y cède promptement, et il est à noter que la stabilité des composés, c’est-à-dire leur résistance aux actions chimiques dont l’air est le principal agent, est en raison inverse de la complication et du nombre de leurs élémens. Après leur mort, les plantes et les animaux restituent à l’atmosphère une partie des principes qui étaient fixés dans leur organisme. Le reste retourne à la terre, qui rend elle-même sans cesse les principes qu’elle contient à l’atmosphère. Celle-ci est donc comme une grande matrice, au sein de laquelle se développe et s’alimente le globe que nous habitons. La vie de la terre n’est pas plus séparée de l’existence de l’atmosphère que celle de l’embryon de la vie de la mère.

Une fois ce fait observé, ce ne fut plus dans la création subite d’une masse solide qu’on a dû chercher l’origine de notre planète. Comme la surface même du sol semble un présent de l’atmosphère, on fut induit à penser que la terre tout entière pouvait tirer son origine de l’enveloppe dont elle est environnée, et l’atmosphère s’offrit en conséquence comme l’image d’un état primordial dont la