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mer, au port le plus proche. Ce port reçoit à son tour les produits de la côte ou de l’Europe, et les expédie sur l’entrepôt intérieur, d’où ils se distribuent dans la zone environnante, et quelquefois vont rejoindre d’autres étapes commerciales, échelonnées de distance en distance du nord au sud. La symétrie remarquable de cette disposition géographique indique d’avance que les routes doivent unir ces comptoirs, spontanément éclos des rapports naturels : à l’est, Philippeville, Constantine, Batna, Biskara; au centre, Alger, Blidah, Médeah, Laghouat; à l’ouest, Oran, Sidi-bel-Abbès, ou Tlemcen.

Le système parallèle au littoral ne se divise qu’en trois grandes lignes. L’une doit courir à portée de la mer, s’infléchissant à l’intérieur toutes les fois qu’elle se heurte à des massifs de roches et de montagnes; elle n’est pas rendue inutile par la navigation à cause de la grande difficulté d’atteindre les mouillages secondaires pendant les mauvais temps. La seconde, d’une exécution beaucoup plus facile, dessine un ruban longitudinal entre les frontières opposées de Tunis et du Maroc, sur un parcours de près de trois cents lieues, et ne se divise qu’en deux grandes sections, de longueur égale, séparées par un chaînon de l’Atlas, entre Amoura, où finissent les plaines basses de l’ouest, et Aumale, où commencent les plateaux élevés de l’est : c’est la grande ligne centrale ou médiane. La troisième, créée d’abord dans une pensée purement stratégique, doit relier tous les établissemens que l’on appelait des avant-postes du temps de la guerre, et qui sont aujourd’hui au milieu même de nos vastes domaines : nœuds commerciaux ou marchés intérieurs qui se rattachent aux villes indigènes du Sahara algérien, dont l’occupation, devenue nécessaire, a rectifié cette fausse idée, que le maître du Tell pouvait de loin et à grandes guides gouverner le Sahara. Quand sera terminé le réseau de la viabilité algérienne, il présentera l’image fort régulière d’un réseau à mailles à peu près égales en longueur et en largeur. L’achèvement des 4,500 kilomètres actuellement classés est estimé à 70 millions.

Les routes partent toutes des ports et y aboutissent, à l’exception des deuxième et troisième lignes parallèles : aussi les mouillages ne pouvaient-ils manquer d’appeler la sollicitude du gouvernement sur une côte redoutée par ses dangers, et qui doit à son imperfection en temps de paix sa force en temps de guerre. La marche des événemens qui ont amené la conquête du pays, ainsi que le rang de capitale maritime, militaire et politique acquis par Alger, ont concentré jusqu’à ce jour la meilleure part des crédits sur le port de cette ville, et plus de 25 millions ont été déjà employés à une création que la nature n’avait point préparée. Le bassin, formé par deux jetées d’un développement total de 19,000 mètres, offre une surface