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tera sur les chambres consultatives d’agriculture et les inspecteurs de colonisation, deux rouages dont l’un fait peu de chose, dont l’autre fait autant de mal que de bien. Des sociétés d’agriculture s’étaient, sur divers points, formées spontanément par le concours des principaux propriétaires et à l’aide de l’appui intelligent des préfets et sous-préfets, qui ajoutaient aux souscriptions particulières de modestes dotations : alliance de l’état et des citoyens préférable sans aucun doute à un isolement farouche. Ces corps libres, en même temps qu’ils éclairaient la pratique agricole, adressaient à l’administration leurs vues et leurs conseils, et prenaient en main, en toute occasion, la défense de l’intérêt général. Au lieu de consolider ces précieuses créations de l’initiative privée, que toujours l’on accuse de faillir à ses devoirs, on les annula par la création de chambres consultatives d’agriculture sur lesquelles on transporta leur dotation, sans accorder à celles-ci aucun des privilèges qui les eussent douées de vie et d’activité. Constituées d’abord par l’élection en 1850, les chambres d’agriculture ne furent convoquées que trois ans plus tard, lorsque le gouvernement se fut réservé la nomination de tous les membres. Elles ne peuvent se réunir qu’une fois par an, sur une convocation et avec un programme officiels. Leur session finie, nulle commission permanente ne les représente. Aussi les procès-verbaux de ces assemblées, stériles fictions plutôt que vivantes réalités, silencieusement accumulés dans les cartons ou parcimonieusement livrés à la publicité, n’ont-ils produit aucun enseignement pour le pays, ni entraîné aucune décision féconde, et d’année en année on voit ces assemblées se décomposer par la démission successive de leurs membres, dont le renouvellement devient un véritable embarras pour les préfets. Veut-on accorder à la propriété rurale sa juste part d’influence et faciliter ses remontrances, que les chambres d’agriculture soient constituées comme celles du commerce, électives, permanentes, pleinement libres de choisir leurs sujets de discussion; mieux encore, que ces deux institutions soient fondues en une seule, qui deviendra en quelque sorte la commission permanente des conseils-généraux, et acquerra une importance qui manque à chacune d’elles prise séparément; enfin que le pouvoir aide de tous ses efforts à la résurrection des sociétés et des comices agricoles.

Les inspecteurs de colonisation n’ont pas été seulement inutiles, souvent ils ont nui. Comme simples employés de l’administration, chargés d’observer la marche de l’agriculture, de la traduire en chiffres et en rapports, de vérifier l’accomplissement des conditions imposées aux colons, de tels fonctionnaires auraient eu leur raison d’être. De ce rôle trop modeste pour leur amour-propre, ils se sont haussés au rang de professeurs de l’art agricole et d’éducateurs des