divine comédie du poète allemand et qui en ont vulgarisé les types sous toutes les formes, la musique seule n’a pas été heureuse jusqu’ici. Il a été fait pourtant un grand nombre de tentatives ou d’essais plus ou moins réussis pour traduire dans la langue des sons la sublime conception de Goethe. Spohr d’abord a composé vers 1810, sur le sujet de Faust, un opéra estimable qui a obtenu un succès relatif. Un amateur distingué, le prince polonais Antoine Radziwill, aidé, je crois bien, par le maître de chapelle Guillaume Schneider, a écrit aussi sur le poème de Goethe une œuvre musicale dont quelques morceaux sont restés célèbres et s’exécutent encore en Allemagne, surtout à Berlin. Mlle Louise Bertin, une femme d’élite, a fait représenter sur le Théâtre-Italien de Paris, le 8 mars 1831, un opéra de Faust dont nous ne connaissons que le titre. MM. Berlioz, Liszt, une foule de compositeurs ont également été attirés par cette donnée épique de Faust, et de tous ces essais il n’est resté de vivant dans la mémoire de tout le monde que l’admirable ballade de Schubert :
Meine Ruh ist hin,
Mein Herz ist schwer.
On sait que Beethoven voulait terminer sa glorieuse carrière par une composition sur le même sujet, dont il n’a pas laissé deviner le caractère. Le génie de Beethoven était seul de taille à se mesurer avec celui de son immortel contemporain, et la postérité doit amèrement regretter que l’auteur de la neuvième Symphonie avec chœurs, de la musique d’Egmont, des Ruines d’Athènes et de Fidelio n’ait pas eu le temps d’accomplir son dernier rêve. Rossini lui-même a caressé l’idée d’écrire un opéra sur le Faust que devait lui préparer M. Alexandre Dumas, si je ne me trompe, et il eût été au moins curieux de voir un génie de la lumière et de la passion extérieure aux prises avec la poésie sombre, chaste et naïve d’une race si différente de celle qui a donné le jour à l’auteur de Guillaume Tell. Il nous reste à examiner maintenant comment M. Gounod a envisagé son sujet et quelle est la valeur de son entreprise.
Le livret de MM. Jules Barbier et Michel Carré reproduisant avec adresse les principales scènes du poème original, qui est suffisamment connu, nous suivrons immédiatement les traces du musicien qui nous conduit nella. città dolente.
Une sorte de récitatif symphonique, car décidément on n’écrit plus d’ouverture, un peu sombre d’abord, et qui va s’éclaircissant jusqu’à l’adjonction des harpes par une progression modérée, précède le lever du rideau, qui laisse voir la chambre d’étude du docteur Faust, vieux, courbé et méditant sur un grand in-folio. Il y cherche la solution du grand mystère, et, comme on l’a dit des psychologues de nos jours, il s’empêche de vivre pour avoir le loisir d’analyser la vie. Une petite symphonie pastorale qui annonce l’arrivée du jour, un chœur matinal qui se chante derrière la coulisse et quelques détails d’orchestre pendant la vision de Marguerite sont les seules choses remarquables de ce premier acte, qui n’est guère qu’un prologue. Ni les récitatifs que chante Faust, ni l’apparition de Méphistophélès évoqué par