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tagnes, qui nuirait au développement des troupes. Alors se ferait sentir l’influence de Legnago. Reliée d’une manière sûre au grand camp de Vérone, cette petite ville possède une double tête de pont sur 1 Adige, et donne à celui qui l’occupe le moyen de déboucher du côté qui lui convient, à proximité soit de Mantoue, soit de Padoue. Legnago n’a d’ailleurs d’importance que comme position militaire; mais à ce titre elle avait attiré d’une manière toute spéciale l’attention de l’empereur Napoléon : il a ordonné lui-même les travaux de fortification que l’on y a faits.

S’attachant toujours à prévenir le retour des événemens passés, l’état-major autrichien s’est préoccupé de la marche hardie tentée, quoique sans succès, en 1848, par le roi Charles-Albert sur le plateau de Rivoli. On a craint de voir après des désastres cette position occupée et la ville de Vérone isolée du Tyrol, et des forts en maçonnerie ont été construits récemment sur le plateau pour en conserver la possession aux troupes du camp principal. Du moins il paraît assez difficile d’expliquer d’une autre manière la création de ces forts, qui se rapprochent par leur forme des tours maximiliennes, et ne pourraient faire une longue résistance, s’ils étaient réduits à eux-mêmes. On ne peut admettre qu’ils soient destinés à protéger la retraite vers le Tyrol d’un corps de troupes qui aurait abandonné Vérone, car la position de Rivoli, excellente pour arrêter une armée qui descend du nord vers l’Italie, n’aurait pas la même valeur dans l’hypothèse contraire. Il n’est pas moins difficile de croire que l’on ait voulu arrêter, au moyen de ces forts, une attaque venant par le Tyrol, car l’armée qui prendrait une voie aussi détournée risquerait trop d’être coupée de toutes ses communications par un retour offensif de Vérone sur Milan, et il est peu probable qu’un général en chef s’expose à rester isolé au milieu des montagnes, hors d’état de recevoir des secours, et réduit à se faire jour à tout prix pour ressaisir ses communications. On doit donc attribuer la construction de ces forts à une prudence exagérée, et plus tard peut-être, si l’Italie recouvre son indépendance, ils pourront servir à sa défense.

En admettant même que, repoussée jusqu’à Vérone, l’armée autrichienne se vit bloquée dans cette ville par des forces supérieures, la route magistrale de l’Adige ne serait pas sa seule communication avec le Tyrol et la seule voie par laquelle elle pourrait recevoir des renforts. Le long du petit lac d’Idro passe un chemin qui, médiocre d’abord, mauvais même dans la montagne, devient parfaitement viable dès qu’il arrive dans la plaine. Une forteresse d’une forme bizarre est suspendue aux rochers et barre complètement cette route : c’est la Rocca d’Anfo, bâtie par les Français pour arrêter les invasions venant du nord, et qui maintenant opposerait une résis-