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lement les sacrifices que l’état pouvait s’imposer, et cependant tous les hommes expérimentés s’accordent à reconnaître que sans ces sacrifices la construction des chemins de fer est à peu près impossible. Aussi l’opinion se prononce-t-elle chaque jour avec plus de netteté. Des pétitions, des écrits spéciaux, pressent tous les pouvoirs d’en venir à une solution de se mettre à l’œuvre, et de voter, s’il le faut, quelques millions plutôt que de laisser souffrir les intérêts du pays et de provoquer une lutte nuisible entre les grands centres de commerce et entre les diverses provinces. Le gouvernement paraît convaincu de cette nécessité d’une solution prompte, et il prépare, dit-on, de nouvelles propositions, qui vont être soumises aux états-généraux. La Hollande se piquera sans doute de regagner le temps qu’elle a perdu.

Les questions économiques et coloniales, disions-nous, sont l’objet d’une préférence et d’une préoccupation visibles en Hollande. En effet, la seconde chambre en est à discuter une réforme nouvelle des tarifs. Il y a peu de temps, c’étaient les affaires des colonies qui provoquaient un laborieux débat. Il s’agissait au premier abord d’une loi approuvant définitivement le boni colonial de 1856 ; par le fait, cette discussion prolongée réveillait toute sorte de questions d’un intérêt sérieux, celle du travail obligé ou libre aux Indes, celle du système de vente des produits coloniaux. MM. Stolte et van Hall ont défendu le système actuel, qui a jusqu’ici assuré de précieuses ressources à la métropole. MM. van Hoevell et Sloet se sont au contraire prononcés pour des réformes qui ont trouvé également un partisan dans un ancien gouverneur des Indes, M. Duymaer van Twist, — et le ministre des colonies, M. Rochussen enfin, a cherché dans ces débats un terme moj-en qui serait évidemment l’idéal de la chambre en ces matières. Cette longue discussion a eu moins pour effet de faire triompher un système que de laisser voir des opinions et des tendances. La loi a été en définitive votée à l’unanimité. Ce dernier résultat n’était pas sans quelque signification politique en présence des attaques assez violentes dirigées depuis quelque temps contre le ministre, à la suite d’une mesure relative au régime commercial des Indes. Une ordonnance qui doit recevoir son exécution au mois de mai prochain a autorisé le gouverneur actuel, M. Pahud, à ouvrir au commerce universel un certain nombre de ports dans les possessions des Indes orientales. Le commerce hollandais s’est ému, surtout lorsqu’il a cru remarquer que l’industrie nationale allait se trouver dans des conditions d’infériorité vis-à-vis de l’industrie étrangère pour les certificats d’origine : un pétitionnement s’est organisé dans les grands centres de commerce. M. Rochussen, qui n’était pas d’ailleurs l’auteur de l’ordonnance, rendue par son prédécesseur M. Myer, n’a point hésité à provoquer un nouvel examen de la question, et cet examen conduira, selon toute apparence, à quelque tempérament. Le régime nouveau introduit dans les colonies n’est, à vrai dire, qu’une conséquence naturelle du système de liberté commerciale qui prévaut en Hollande comme en d’autres pays de l’Europe. Tous les esprits modérés partagent ces idées ; on aurait voulu seulement une application plus mesurée, moins brusque, dans une situation où l’on peut déjà remarquer cette assez grave coïncidence de la diminution des importations de l’industrie hollandaise aux Indes et de l’accroissement des importations de l’industrie étrangère. La Hollande enfin vient de signer une nouvelle convention avec l’empire