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mais le cabinet de lord Derby dût-il même se trouver en minorité et recourir à l’expédient d’une dissolution, nous croyons que cette mesure n’aurait pas lieu immédiatement : la session serait continuée pendant deux mois encore pour l’expédition des affaires urgentes ; les élections n’auraient pas lieu avant l’été, et par conséquent le ministère, même en admettant que l’épreuve électorale dût lui être défavorable, garderait le pouvoir plus longtemps qu’on ne le suppose. Cette considération n’est pas indifférente dans la situation actuelle de l’Europe. Il est encore un incident qu’on ne peut passer sous silence, car il vient avec un singulier à-propos donner à l’Angleterre le parlant spectacle des souffrances de l’Italie. Grâce à la tardive clémence du roi de Naples et à la maladresse avec laquelle le gouvernement napolitain a exécuté sa récente amnistie, l’infortuné Poërio et ses intéressans compagnons sont aujourd’hui les hôtes fêtés de l’Angleterre, et réveillent par leur présence les sympathies du peuple anglais pour la cause de la liberté italienne. Une souscription généreuse s’ouvre au profit de ces victimes du despotisme, et M. Gladstone enfin revenu à Londres, M. Gladstone, qui avait si éloquemment dénoncé à l’Europe les injustes traitemens infligés à M. Poërio, figure parmi les meneurs de cette manifestation nationale. Le séjour de M. Poërio et des exilés napolitains en Angleterre est, dans les circonstances présentes, une bonne fortune imprévue pour la cause italienne. Les grandes perplexités de la politique, telle qu’elle apparaît aujourd’hui, ne nous font pas oublier qu’il est des pays modestement appliqués à tout un courant d’affaires embrassant une multitude d’intérêts pratiques. Les questions économiques, les questions de douane et de commerce, les questions coloniales, ont toujours une faveur particulière en Hollande, et sont l’objet permanent des discussions des états-généraux de La Haye. Les chemins de fer surtout occupent les Hollandais depuis quelque temps, et cela s’explique. Il y a plus de vingt-cinq ans que le premier projet d’une voie ferrée de quelque importance était mis à exécution. Cette ligne laborieusement ouverte était bientôt suivie d’une autre, et depuis ce moment le développement d’un système plus complet de communications entre les provinces et avec l’étranger n’a rencontré que des entraves, si bien que l’étendue des chemins de fer hollandais n’a point dépassé 260 kilomètres. Il en est résulté un fait très simple, c’est que le commerce de la Hollande, bien que toujours actif, ne s’est point proportionnellement développé autant que celui de la Belgique, qui a un réseau complet de voies ferrées. Ce n’est que depuis quelques années que la question s’est réveillée à La Haye, en présence de l’extension universelle des lignes de fer, et en quelque sorte sous le coup de la nécessité. Le gouvernement a donc tout d’abord présenté une loi autorisant la concession du chemin dit du nord-est : il laissait dans l’ombre la ligne du centre et du midi. La seconde chambre n’a fait qu’être l’écho de bien des plaintes en se montrant peu satisfaite des conditions proposées pour le chemin du nord-est, conditions considérées comme onéreuses pour l’état. La cause des lignes du centre et du midi a été aussi plaidée devant les états-généraux. Ce premier examen a tout au moins laissé voir une assez grande divergence de vues tant au sujet de la direction des lignes que des conditions mêmes de la concession. Le rapport fait dans la seconde chambre était sans doute dans ses conclusions favorable aux chemins de fer ; en réalité, il mesurait assez peu libéra-