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LE CHEVALIER
DE CHASOT

Mémoires et Souvenirs du chevalier de Chasot, recueillis et publiés par M. Kurd de Schloezer; Berlin, Wilhelm Hertz, 1858.



A Berlin, dans l’un des appartemens du château royal, figure un portrait qu’il est impossible de ne pas remarquer en passant. La toile, peinte par Antoine Pesne, représente un jeune officier aux gardes en costume de bal. Sous le domino rose aux plis flottans apparaît l’élégant uniforme des dragons de Baireuth avec la croix émaillée de bleu de l’ordre pour le mérite, que le personnage en question porte attachée au cou par le ruban noir à liséré blanc. La main droite tient négligemment un masque de satin, et la tête est couverte d’un léger tricorne à ganse d’argent. Quant à la physionomie, rien de plus fier, de plus vainqueur : un aplomb à tout braver, l’intrépide assurance d’une âme jeune et superbe dans un corps dispos et bien tourné, quelque chose de hautain, de provocant, d’aventureux, qui trahit le soldat de fortune et l’homme de guerre. — Ce paladin et ce masque, c’est le chevalier François Egmont de Chasot, né à Caen le 18 février 1716, élevé au collège des jésuites de Rouen, puis incorporé aux cadets gentilshommes, et qui, après une existence des plus romanesques, après avoir abandonné le service du roi de France pour s’enrôler sous les drapeaux de Frédéric, dont il fut le compagnon d’armes et l’ami, finit à quatre-vingt-un ans (24 août 1797) par mourir à Lubeck commandant de place, lieutenant-général, chargé de titres et d’honneurs récoltés par toute l’Europe.