à mesure que le nombre et l’importance des installations nouvelles se multipliaient, que les usines recevaient des perfectionnemens notables et attiraient aux colonies des ingénieurs et des ouvriers mécaniciens capables de mieux diriger les travaux, de réparer au besoin les pièces accidentellement endommagées. Ces améliorations graduelles et d’heureuses et récentes innovations ont enfin résolu les principales questions posées plus haut, notamment dans les belles colonies espagnole et française de la Havane et de la Réunion. C’est à la Havane surtout que se sont rencontrées les circonstances les plus favorables à l’établissement des grandes sucreries coloniales, exploitées par les moyens les plus économiques dont la science de nos jours ait doté l’industrie, et c’est aussi dans cette île privilégiée que se sont fondées et que se développent en ce moment les plus vastes installations récemment acquises par de puissantes compagnies[1]. Le sol de la Havane, bien moins accidenté que celui de la Réunion, a permis d’accélérer et de rendre plus économiques la récolte et le transport des cannes aux usines à l’aide de chemins de fer traversant les champs en culture : une telle rapidité dans le transport de la matière première est d’une haute importance pour le succès des opérations dans ces usines, car, sous le climat chaud où la canne se développe, la formation rapide des fermens dans les sucs dès qu’ils sont exposés à l’air, sur toutes les coupes des tiges, doit engager les colons à employer tous les moyens praticables de hâter la récolte, la mise en travail des cannes et le traitement des jus[2].
Les cannes immédiatement soumises à la pression énergique des nouvelles presses à cylindre donnent, dans les deux colonies espagnole et française, de 70 à 80 centièmes de jus au lieu de 55 ou 60 qu’on en obtenait autrefois. Ce remarquable résultat est dû non-seulement à la solidité de construction et à la puissance énorme
- ↑ Il a paru dans ces derniers temps un magnifique album qui représente en perspective, par des dessins coloriés, les principales sucreries de Cuba.
- ↑ Sous ce rapport, on espère obtenir de nouveaux avantages en ajoutant au jus, au moment même où il s’écoule des presses à cylindre, quelques millièmes de bisulfite de chaux en dissolution. Cet agent antiseptique, qui s’oppose énergiquement aux fermentations de la matière sucrée, paraît être employé avec succès à la Louisiane, où les jus, moins riches en sucre et plus chargés de substances étrangères, offrent des chances d’autant plus graves d’altération. Le sulfite de chaux a dans son action spéciale beaucoup d’analogie avec l’acide sulfureux, anciennement employé par Proust pour prévenir la fermentation des moûts de raisin destinés à la préparation des sucres et sirops. Dans nos sucreries indigènes actuelles, où les circonstances de température hivernale laissent moins de prise aux fermentations que dans les sucreries exotiques, l’application du sulfite de chaux n’a pas donné en grand de résultats avantageux.