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caisses parisiennes qui existaient avant février 1848, les embarras de la Société générale de Belgique, les crises de toutes les banques anglaises et américaines, etc.

Cette première objection est-elle bien grave? Si la création des produits est inépuisable aussi bien que la circulation de ces mêmes produits, le crédit, s’appuyant sur l’une et sur l’autre, doit se prêter aux mêmes développemens : il peut être escompté et renouvelé de la même façon. Avant que la somme des entreprises fructueuses soit épuisée, une longue carrière reste à parcourir pour les institutions dont il s’agit, et si, par une conduite prudente, elles ont su acquérir dans le public un vrai renom d’habileté, en un mot se créer une clientèle propre, nul doute que leur crédit ne suffise à leur procurer sans cesse l’aliment dont elles ont besoin. Les conditions du crédit industriel ne sont pas les mêmes à coup sûr que celles du crédit commercial, il faut donner au revenu sur les produits à venir un autre prix qu’aux escomptes des produits créés; mais qu’en ayant soin de commanditer seulement des entreprises sérieuses, en le faisant avec mesure, et sans trop de précipitation, on ne soit pas assuré de voir le public y prendre part, qu’on arrive en un mot à l’inaction forcée, cela n’est guère à craindre. Quant aux effets des catastrophes publiques, des grandes crises par lesquelles il semble que la société doive passer comme par une sorte de maladie chronique, les conséquences en seront certainement plus à redouter pour ces établissemens que pour les banques commerciales proprement dites. Celles-ci ne prêtent que pour une date rapprochée, et sur plusieurs signatures : elles ont par conséquent plus de facilités de se liquider à bref délai, et sans grande perte de capital. Pour les banques de commandite industrielle, une liquidation serait longue, et en définitive, même avec des placemens sérieux, aboutirait à une perte importante sur le capital commanditaire. Dans ces graves circonstances toutefois, les unes et les autres subiraient la même nécessité, également ruineuse pour les intérêts engagés, celle d’une suspension et d’une liquidation. Pour obvier à un tel mal, les banques commerciales emploient, comme on l’a vu, la ressource du cours forcé des billets, c’est-à-dire qu’on use d’un artifice de liquidation nécessaire sans doute et préservateur; mais ce n’est pas là un paiement véritable. On pourrait l’appliquer avec moins de succès en fait, mais avec autant de raison en droit, au papier des banques industrielles.

La seconde objection soulevée, et elle n’est pas moins sérieuse, est celle de l’aliment que des sociétés de ce genre offrent à la spéculation. Dans un parallèle précédemment établi entre les progrès de l’industrie et de la spéculation, on avait essayé de poser les termes, sans contredit rassurans, de cette comparaison ; on voulait