que dans le lointain continent dont l’Angleterre a su faire le centre et le foyer de sa colonisation océanienne. Là se continue une lutte acharnée entre la civilisation et la barbarie, et si la première, servie par l’énergie et l’activité de la famille anglo-saxonne, favorisée par des circonstances particulières et inattendues, telles que la découverte des gisemens aurifères, fait chaque jour des progrès, cependant il suffit de mesurer d’un coup d’œil l’espace relatif qu’occupent dans l’Australie les colonies d’un côté, de l’autre la terre sauvage, pour voir combien encore il lui reste à conquérir.
Si jamais il y eut une terre réservée pour la barbarie, et où la nature semblât se complaire à subsister telle qu’au premier jour, vierge et libre des atteintes de l’homme civilisé, après le centre de l’Afrique, c’était certes l’Australie. Sur les côtes du nord-est au tropique, d’imperceptibles madrépores ont bâti, par un travail sans relâche, ces bancs à fleur d’eau, aux dessins capricieux et bizarres, que les navigateurs appellent les récifs de la Grande-Barrière. Ni golfes ni découpures ne pénètrent la masse compacte qu’enveloppent et défendent ces redoutables murailles, et l’explorateur terrestre, aussi peu favorisé que le marin, ne trouve pas même en Australie, comme en Afrique, la ressource des longues vallées et des grands fleuves. Devant tant d’obstacles, l’homme civilisé sembla d’abord ratifier le verdict de la nature : il abandonna pendant plus d’un siècle à sa solitude ce continent, le dernier découvert et peut-être le dernier-né de la création ; puis les hôtes qu’il lui envoya furent des malheureux chassés en expiation de leurs fautes, et mis au ban de la société en ce lieu solitaire et sauvage. Telle est cependant la puissance communicative du génie européen, que ces réprouvés mêmes devinrent un instrument de colonisation.
Nous n’avons pas à revenir ici sur les essais lents et pénibles qui datent de la fin du dernier siècle, et sur les explorations réitérées, impuissantes d’abord, ensuite plus heureuses, qui eurent pour résultat d’éveiller la curiosité et d’apporter sur l’intérieur de l’Australie des notions tout à fait nouvelles. Au milieu même de ces difficultés, l’asile ouvert aux convicts libérés grandit et se développa ; bientôt de nouvelles villes sortirent du sol ; toutes les extrémités du continent furent attaquées à la fois ; des flots d’émigrans abordèrent tous les rivages ; l’or donna pour auxiliaire à ce mouvement son immense attraction, si bien que l’Australie est devenue un des centres coloniaux les plus importans. Elle a donné la vie à ses voisines, la Tasmanie et la Nouvelle-Zélande, et la ville de l’or, Melbourne est une petite Londres ; bientôt peut-être elle sera une autre Calcutta. Cela n’empêche pas qu’aux portes des villes bâties à l’européenne, éclairées par le gaz et sillonnées par d’innombrables voitures, l’indigène fasse entendre son cri toujours sauvage, et que des plaines