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de Nagpour l’informait des négociations qu’il venait d’ouvrir lui-même avec Holkar. Pour gagner à leur cause Djeswant-Rao, les confédérés firent avec lui un traité dont l’acceptation dépendait entièrement de Dowlat-Sindyah. Celui-ci, oubliant ses rancunes, restitua au représentant de la famille Holkar les territoires qui lui avaient été enlevés et la personne du petit prince, son neveu, — Koundie-Rao, fils de Molhar, — détenu dans une forteresse depuis sa naissance. Djeswant-Rao devait, pour prix des avances qui lui étaient faites, entrer franchement dans la ligue et aider les confédérés de tous ses moyens. Il promit d’abord d’envoyer ses troupes dans les provinces du sud, et se mit en marche avec le chef patan dont il avait fait son allié, Amir-Khan. Comme ils traversaient en- semble sur un bateau la Nerboudda, grossie par les pluies, ces deux hommes se prirent à converser sur les chances de la guerre. L’avenir se montrait à eux sous de sombres couleurs. Qu’avaient-ils à gagner dans une expédition où il s’agissait d’attaquer les bataillons serrés et la grosse artillerie des Anglais? Il y aurait à rapporter de ces combats plus de blessures que de butin. Habitués à ravager les pays amis et ennemis, ils ne comprenaient que la guerre de partisans. L’esprit des deux chefs ne pouvait s’élever jusqu’au désintéressement du patriotisme, et si Djeswant-Rao souffrait de voir l’indépendance de son pays menacée, qu’importait à Amir-Khan, Patan de race et aventurier de profession, qui tant de fois avait changé de bannière, la chute plus ou moins prochaine de la confédération mahratte? Les conseils égoïstes du Patan l’emportèrent sur les hésitations de Djeswant-Rao; le bateau qui les conduisait vers la rive méridionale du fleuve les ramena sur l’autre bord, et les troupes qui venaient dépasser revinrent en arrière. La défection de Djeswant-Rao, pour être masquée par des excuses et même par de sages conseils adressés à Sindyah sur le danger qu’il y aurait de sa part à attaquer de front les Anglais, n’en fut pas moins consommée. La confédération ne comptait plus que deux chefs : Dowlat-Rao et le râdja de Nagpour.

Il fallait cependant que leurs armées combinées fussent solides et aguerries, et qu’il y eût encore un certain prestige dans le nom de ces deux princes, car le gouvernement britannique fit pour les combattre des arméniens inaccoutumés. Décidé à frapper un grand coup et à attaquer les confédérés sur tous les points à la fois, le gouverneur-général marquis de Wellesley tira des diverses présidences des forces considérables qui montèrent bientôt à cinquante mille hommes. La seule cavalerie des princes mahrattes atteignait ce chiffre, et c’était bien la meilleure de l’Inde; l’infanterie et l’artillerie de Sindyah, commandées par le général Perron, successeur du