est obligée de se mouvoir dans les événemens qui nous sont familiers. L’inépuisable analyse de nos sentimens ordinaires, l’étude des intérêts et des passions, voilà le principal fondement des œuvres dramatiques. Une place inoccupée, des élémens nouveaux, attendent la jeune génération littéraire. Répondra-t-elle à cet appel ? Nous le croyons, et ce n’est là qu’une question de temps. Si nous recherchions cependant les causes qui retardent un essor intellectuel si désiré, si nécessaire, nous les trouverions surtout dans les dispositions d’un public chez qui l’on rencontre tant de dédain pour la pensée libre, tant d’indulgence pour des pauvretés de la pire espèce. Le succès de mode ou de scandale qu’ont obtenu durant l’année qui vient de s’écouler tant d’œuvres d’une vitalité factice accuse dans l’opinion des tendances mille fois plus regrettables que ne peuvent l’être le découragement de quelques écrivains et l’impuissance du plus grand nombre. Le public, il faut le dire, manque à ses droits comme à ses devoirs en acceptant aveuglément tout ce qu’on lui présente sous l’absurde prétexte de le divertir ou de le moraliser, sans compter que c’est l’effet contraire qui est le plus souvent obtenu. Il faut que les gens qui pensent sérieusement secouent le joug et se persuadent qu’une œuvre d’art ne doit avoir qu’un but, le vrai et le beau. Tant mieux si elle corrige ou si elle divertit, mais c’est là un résultat secondaire. Rien ne prouve mieux que l’état du théâtre actuel cette fâcheuse manie de flatter le goût du public. L’art dramatique s’éloigne des sphères où il trouvait autrefois sa plus haute expression, et tandis que le Théâtre-Français se contente d’essais ou de reprises médiocres, la critique est réduite souvent à chercher sur des scènes secondaires des productions dignes de son examen, telles que les comédies de M. Alexandre Dumas fils, de M. Augier et de M. Octave Feuillet. Le Roman d’un Jeune homme pauvre, Cendrillan, Hélène Peyron, sont des preuves de l’application constante de ces théâtres à faire des tentatives qui contiennent à divers degrés des élémens sérieux de succès. Le Théâtre-Français cependant garde à peine le respect de ce qui fait sa gloire. Il est inouï par exemple que les Caprices de Marianne, le chef-d’œuvre dramatique d’Alfred de Musset, servent de lever de rideau à je ne sais quels vaudevilles sans couplets. C’est ainsi que pour le passé se perdent les grandes traditions, que pour le présent le goût s’abâtardit, que pour l’avenir rien ne demeure des frivolités et des pastiches qui se jouent à la plus grande joie de quelques provinciaux ébahis. On se fait l’esclave du public, quand il est si facile de tout toi imposer, même les choses sérieuses. Efforçons-nous à restaurer le culte du beau : ce n’est pas seulement la tâche des écrivains, c’est encore la mission de ceux qui sont appelés à diriger la représentation de leurs œuvres.
EUGÈNE LATAYE.
S’il est un fait aujourd’hui reconnu par quiconque porte intérêt au développement de l’agriculture en France, c’est que ses progrès futurs doivent