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jeter un regard d’envie. Cependant, pour être juste, il faut reconnaître qu’elle est dans une meilleure situation maritime. Que le bruit de l’or s’apaise, et Port-Jackson pourra de nouveau attirer plus de navires que la baie Hobson. Le port Jackson, sur le bord duquel s’étale la ville de Sydney, est en effet un des havres les plus sûrs et les plus beaux du monde. La ville est en général bien bâtie ; les rues principales, George-Street, Paramatta-Street, etc., pavées avec de larges quartiers de roc, sont sillonnées par des voitures publiques, par des équipages splendides, et abondent en somptueux magasins. On n’y voit pas la même diversité de visages et de costumes que dans Melbourne ; tout y rappelle l’Angleterre, et Sydney aurait une physionomie entièrement britannique, n’étaient les squares et les jardins ornés de palmiers, de bananiers, de minces bambous, et déployant toute la luxuriante verdure des tropiques. Des hauteurs de Hyde-Park, promenade principale de Sydney, l’œil embrasse une vue singulière : au premier plan, une ville anglaise avec tous ses édifices, églises, muséum, université ; plus loin, cette montagne couronnée de constructions de tout genre à laquelle est resté le nom bizarre de Wooloomooloo ; plus loin encore, des fermes, des troupeaux, une riche verdure ; puis, à l’extrême horizon, les lignes onduleuses et indécises des montagnes qui servent de barrière entre la civilisation et la barbarie. Toute la côte qui s’étend entre Port-Jackson et Botany-Bay, nom que cette région mérita, au temps de la découverte de Cook, par ses variétés nouvelles de plantes et ses richesses végétales, est couverte de maisons de campagne qui, durant les mois les plus chauds de l’année, c’est-à-dire en décembre et janvier, servent de retraite aux riches négocians de Sydney. La différence de latitude avec Melbourne s’y fait déjà fortement sentir ; aussi son jardin botanique est bien plus riche, et dans le musée zoologique de Botany-Bay, à côté des kangurous, des écureuils-volans, des casoars, des cygnes noirs et des autres animaux bizarres que produit ce continent, vivent et prospèrent le tigre et l’éléphant importés du Bengale.

C’est en 1840 que Sydney a cessé de recevoir des convicts ; les pénitentiaires ont été transportés dans la Tasmanie, et, à l’autre extrémité du continent, dans la colonie de Perth. Le système de déportation, qui a été le point de départ de la colonisation australienne, doit-il continuer d’être mis en vigueur, et faut-il l’appliquer à ces régions de l’Australie septentrionale qui viennent, comme nous le verrons bientôt, d’être le théâtre de grandes découvertes géographiques ? C’est là une des questions les plus controversées en Australie et dans la métropole. Personne ne met en doute cependant qu’on doive faire du point situé à l’ouest du golfe de Carpentarie et de Port-Essington, au fond de la baie de Cambridge, sur la rivière