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en temps une certaine somme d’agent nerveux qui est dépensée ensuite peu à peu. Ce système serait semblable ainsi à une bouteille de Leyde, inerte par elle-même, mais qui, chargée d’électricité, agit ensuite à son tour, et perd peu à peu son fluide par des décharges qui semblent lui être propres. Ceci explique en partie pourquoi, dans le sommeil, le cœur bat avec une rapidité toujours égale, quoique la sensibilité et les mouvemens des membres aient en grande partie cessé. Le système sympathique agit alors par lui-même, comme un producteur d’agent nerveux, quoiqu’il n’en produise point; mais il a reçu de l’encéphale, pendant la veille, la somme d’agent nerveux qu’il dépense durant le sommeil. Ajoutons enfin que M. Flourens a vu depuis longtemps que les filets de ce nerf ont une sensibilité très obtuse, et que M. Bernard a observé ce fait singulier, que la section du grand sympathique élève la température du corps, tandis que celle des nerfs du mouvement et de la sensibilité l’abaisse. C’est un résultat qu’aucune théorie ne pouvait prévoir et ne peut expliquer.

Quant aux nerfs des organes des sens, ils mériteraient une étude à part, car ils ont chacun une sensibilité propre, et lorsqu’on les irrite, on ne produit ni douleur ni mouvement, mais une sensation particulière et différente pour chacun d’eux. L’excitation du nerf optique lui fait transmettre au cerveau l’impression de la lumière, comme il arrive à la suite d’un coup frappé sur l’œil, et ainsi des autres. Ces nerfs ne peuvent point se remplacer, et chacun d’eux a des propriétés spéciales; sans cela, ils serviraient tous indistinctement à la vue, au toucher, au goût ou à l’ouïe, ce qui n’est pas. À ce propos, nous ne ferons qu’une seule remarque, relative aux impressions que la plupart d’entre eux transmettent. Ces impressions sont dues à un certain état des nerfs sensoriels, et non point aux qualités réelles des corps extérieurs. La lumière n’est pas lumineuse, le son n’est pas sonore; mais certaines vibrations de l’éther ou de l’air mettent des nerfs déterminés dans un état tel que nous éprouvons la sensation de la lumière ou du son. Entre cette sensation et la réalité, il n’y a point d’analogie appréciable. Autant il est faux de dire que nous sommes trompés sans cesse par nos sens, autant il est juste de distinguer ce qu’ils nous transmettent de ce qui les affecte. Le son et la lumière existent seulement comme vibration : faites vibrer un diapason près de la main, et vous aurez la sensation d’un chatouillement. Pour que cette même sensation soit perçue comme son, il faut que quelque chose soit ajouté aux vibrations, et cette condition n’est attachée qu’au nerf auditif. Réciproquement aussi, par un irritant ou par l’électricité, on produit l’impression d’une irritation du nerf optique, c’est-à-dire une impression lumi-