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France et la jeune France d’outre-mer[1]. » Il serait difficile d’indiquer en termes plus précis et plus clairs la modification bien simple que comporte la loi de 1851. Les partisans d’un régime plus libéral en matière d’échanges devraient accueillir avec empressement la suppression des obstacles qui gênent encore les relations de l’Algérie avec la France, et les partisans de la protection douanière ne sauraient contester légitimement la sagesse d’une réforme qui laisserait intacte la condition présente de l’industrie métropolitaine sur les marchés de la colonie.

L’agitation qui s’est manifestée récemment dans nos principaux centres manufacturiers ne répondait évidemment qu’à une menace de libre échange absolu. Tout serait demeuré calme, si, au lieu de dresser cet épouvantail, l’on s’était borné à faire pressentir simplement la révision d’une loi qui, après plus de sept ans de durée, peut recevoir d’utiles amendemens, indiqués par l’expérience. Cette nouvelle n’eût surpris ni effrayé personne, car on comprend que la création d’un ministère de l’Algérie et la présence d’un prince à la tête de ce ministère annoncent le projet très arrêté d’imprimer à l’œuvre de la colonisation une impulsion plus énergique. Il est donc permis d’espérer que la réforme, très modeste assurément, que les colons algériens appellent de leurs vœux, s’accomplira dans un avenir prochain. Elle n’implique, de la part de la métropole, l’abandon d’aucun principe, le sacrifice d’aucun intérêt immédiat. Elle procurerait à l’Algérie les moyens d’attirer plus sûrement les immigrans et les capitaux, d’obtenir une production plus abondante et plus variée, enfin de se créer sur notre marché une meilleure clientèle, tout en conservant ses rapports avec l’étranger. Ce serait un pas de plus dans la voie qu’a tracée la loi de douane de 1851, en même temps qu’un grand service rendu à la colonisation africaine. En présence d’une pareille œuvre, que la France est engagée d’honneur à mener à bonne fin, les stériles disputes d’écoles doivent se taire, les intérêts exclusifs doivent s’incliner. Nous avons peine à croire qu’une transaction conçue dans les termes qui viennent d’être indiqués n’obtiendrait pas l’assentiment des pouvoirs législatifs, si elle était soumise à leur examen.


C. LAVOLLEE.

  1. Procès-verbaux de la Société centrale de colonisation (séance du 21 juin 1858), publiés par les Annales de la Colonisation algérienne, n° d’août 1858.