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fabriquer les tuyaux de drainage, et ces députés protestaient en même temps de leur attachement au système, protecteur. Ce système, sainement compris, ne fait donc pas obstacle à ce que, dans des cas déterminés, on admette exceptionnellement la nécessité de taxes réduites. De même, au début de la construction des chemins de fer, la chambre des députés a été sur le point d’adopter une disposition qui diminuait de moitié le droit d’importation sur les rails, et à cette occasion, puisque l’on paraît s’occuper d’établir des voies ferrées en Algérie, nous exprimerons le vœu que le tarif des matériaux nécessaires pour ce grand travail subisse une réduction considérable, afin que, le capital à amortir et à rémunérer se trouvant moindre, les frais de transport puissent être fixés à un taux très bas. — Si nous examinons les autres articles que, sous les règles du tarif actuel, l’étranger a la faculté d’introduire en Algérie, nous voyons que les importations de la métropole surpassent en général celles de l’étranger. Ce fait prouve que la protection résultant de ce tarif est très suffisante pour assurer à l’industrie nationale une large place sur les marchés algériens, pendant que la modération des droits d’entrée applicables aux marchandises étrangères garantit l’Algérie contre l’exagération des prix et contre les abus du monopole. Pourquoi modifierait-on cet état de choses ?

Il n’est pas malaisé de voir ce qui froisse le plus nos industriels dans l’économie du tarif algérien : c’est la suppression des prohibitions. La prohibition des tissus, l’arche sainte, a été renversée en Algérie ! Les calicots, si sévèrement repoussés par les douanes métropolitaines, peuvent s’étaler, dans la colonie, sur des épaules arabes devenues françaises ! Voyons cependant les faits. En 1857, il a été importé en Algérie des tissus de coton pour une valeur de 20 millions de francs, et sur cette somme les fabriques françaises ont fourni 16 millions, tandis que les fabriques étrangères, sous le coup d’un droit de 30 pour 100, n’ont fourni que 4 millions. Il a été importé 6 millions de tissus de laine ; la part des fabriques françaises a été de 5,700,000 fr., et celle des fabriques étrangères, de 300,000 fr. Prenons un autre article qui n’est pas moins célèbre dans l’histoire de nos discussions douanières : la poterie, prohibée en France, mais admise en Algérie moyennant un droit de 20 à 25 pour 100. Sur une importation totale de 721,000 kilogrammes en 1857, les manufactures françaises ont fourni 567,000 kilogrammes, et les manufactures étrangères 154,000. L’industrie nationale n’éprouve donc pas de préjudice sérieux par suite du tarif en vigueur, et le régime, dont nous demandons le maintien, a eu pour résultat de sauvegarder l’intérêt du travail national et de défendre la colonie non-seulement contre le fléau de la cherté, mais encore contre les fraudes commerciales dont il parait qu’elle aurait pu être victime. Nous lisons dans un document officiel qui fut distribué en 1850 au conseil-général du commerce, et qui contient l’exposé d’un projet de loi sur le régime douanier de l’Algérie, le passage suivant : « Les droits sur les tissus étrangers de laine et de coton ont été maintenus tels qu’ils avaient été