de la commission, compléta un intéressant rapport par deux discours, qui, à distance et à la lecture, paraissent presque éloquens. Ces orateurs se partagèrent entre eux le soin de répondre à MM. Darblay, d’Havrincourt, de Limairac, qui voulaient, au nom de l’agriculture, repousser la franchise proposée en faveur des céréales, des graines oléagineuses, des laines de l’Algérie. Sans faire tort aux considérations développées par M. Charles Dupin, ni aux exposés très complets de M. le général Daumas, qui a, depuis cette époque, rendu d’autres services à la cause de l’Algérie, on peut dire que les honneurs de cette brillante discussion reviennent surtout à MM. Dufaure et Passy, dont les discours méritent d’être cités comme des modèles de sagesse politique et de science économique. Ce qui distingue ces discours, ce qui en fait la force et l’éloquence, c’est qu’ils sont vrais aujourd’hui comme ils l’étaient il y a sept ans ; c’est qu’ils retracent en termes saisissans les destinées futures de l’Algérie, c’est qu’ils marquent le but que nous devons atteindre, et nous éclairent ainsi la route droite que nous avons à suivre, jusqu’à ce que ce but soit touché
En effet, si dès cette époque la démonstration fut complète, l’œuvre législative ne fut qu’à moitié accomplie. On obtenait pour les principaux produits naturels de l’Algérie l’exemption de tous droits à leur introduction dans la métropole. Ces produits étaient énumérés dans un tableau annexé à la loi ; mais il pouvait se présenter d’autres produits non dénommés, comme on dit en style de douane, qui réclameraient et mériteraient la même franchise, soit dans l’intérêt de l’Algérie, soit même dans l’intérêt de la métropole, qui les emploierait utilement à son travail industriel. Ces produits devaient-ils demeurer soumis au tarif général et continuer à être taxés comme étrangers ? Le mode le plus simple eût été, sans nul douter de ne point faire de catégories, et de décider que toutes les productions naturelles de provenance algérienne seraient affranchies de droits. On n’osa pas aller si loin, tant on avait à cœur de ne point blesser les susceptibilités protectionistes et de ne procéder qu’à l’égard des produits connus ! On se borna à insérer dans la loi une disposition qui attribuait au pouvoir exécutif la faculté de prononcer par décret, sous la réserve de la sanction législative, la libre admission des productions naturelles qu’il paraîtrait convenable de joindre à l’énumération de celles qui étaient déjà désignées. Cet expédient sembla, pour le moment, devoir suffire. Quant aux produits fabriqués de l’Algérie, la loi accorda l’importation en franchise d’un certain nombre d’articles de main-d’œuvre indigène, tels que tapis, haïcks, burnous, pipes, etc. : on désirait favoriser la petite industrie arabe, ce qui était un bon sentiment et une grâce sans péril, car notre travail national n’avait point encore songé à fabriquer des haïcks ni des pipes turques ; mais tous les autres produits demeurèrent frappés des droite du tarif général ; ce qui indiquait que l’on entendait empêcher ou au moins ajourner toute tentative d’industrie manufacturière dans la colonie.