La carrière est vaste au Sénégal ; après ce rapide aperçu, on ne saurait en douter. Et néanmoins la politique française dans cette colonie, pour être solidement assise sur son propre terrain, doit étendre ses ramifications bien au-delà. Le bassin tout entier du fleuve doit devenir l’horizon de notre action immédiate, et le bassin même du Niger s’ouvrir à notre influence, car on y trouve partout des sympathies à féconder, des échanges à négocier. En même temps le système de commerce et de travaux publics doit se mieux prêter qu’aujourd’hui à un accroissement d’échanges tant avec la métropole qu’avec l’étranger. Enfin ce double courant de progrès à l’intérieur et à l’extérieur doit nous conduire vers l’Afrique centrale, au cœur du Soudan. Telle est la destinée naturelle, nous dirions volontiers l’horoscope, de notre colonie du Sénégal, qu’il reste à justifier par quelques développemens.
Nous avons dit les ressources naturelles du Oualo, dont les plus mauvais terrains avaient été malencontreusement choisis pour les essais de colonisation de 1821, ce qui fut la cause première de l’échec qu’on eut à subir. Les larges cours d’eau qui le baignent, dont le principal aboutit au grand lac de Paniéfoul, sur les bords duquel s’élève le fort de Mérinaghen, permettent à des navires d’un fort tonnage d’y circuler pour charger et décharger leurs cargaisons. La population seule, qui y fait trop défaut aujourd’hui, suivra le rétablissement complet de la sécurité. Elle pourra se recruter parmi divers élémens étrangers, entre autres les esclaves fugitifs des divers états de l’intérieur, qui y trouveront asile, et les engagés à temps qui, des Antilles ou de la Réunion, demanderont à être rapatriés à la côte occidentale d’Afrique ; on pourrait y joindre les esclaves recueillis sur les navires négriers, comme l’Angleterre en donne l’exemple à Sierra-Leone, peuplé en grande partie de ses prises. De petits lots de terre suffiraient à l’ambition et feraient la fortune de tous ces malheureux. Ainsi le Oualo, devenant un centre d’activité agricole et commerciale, serait le grenier d’approvisionnement de Saint-Louis, dont le voisinage servirait d’aiguillon pour le travail et le gain.
Le Cayor, dont la population, plus industrieuse, distribuée en villages rapprochés et considérables, est évaluée à trois cent mille âmes, disséminées sur huit cents lieues carrées, fournit déjà au marché de Saint-Louis la presque totalité de ses arachides et beaucoup de mil ; le tout ne va pas à moins de 8 millions de kilogrammes