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atteignirent, non sans difficultés, le village de Sansanding, sur les bords de la Falêmé, et se trouvèrent au seuil de la région aurifère, en des lieux où la récolte de l’or se fait par le simple lavage des sables qui bordent la rivière. Quelques autres journées de marche les conduisirent à Kaniéba, au cœur même du Bambouk, dans la partie la plus riche. En se présentant pour visiter les mines de cette localité, nos voyageurs trouvèrent la population sous les armes, démonstration qui était un honneur et non une menace. Cette milice d’un nouvel aspect leur fit cortège avec de grands témoignages de joie, et leur donna même deux orpailleuses pour travailler sous leurs yeux la terre aurifère : les voyageurs furent ainsi initiés à tous les détails d’une exploitation aussi primitive dans ses instrumens et ses procédés qu’insignifiante dans ses résultats, comme on en jugera par un rapide aperçu. Les mines de Kaniéba, les plus riches de toutes celles du Bambouk, sont situées dans un terrain d’alluvion formé de sable, de cailloux quartzeux roulés et de schiste ferrifère micacé, contenant quelquefois des parties de terre grasse et noirâtre. Dans ce terrain, les indigènes creusent des puits d’une profondeur de 7 à 40 mètres, aboutissant à une galerie horizontale qui se prolonge rarement au-delà de 40 à 50 mètres. Le minerai, extrait par des hommes en gros fragmens, est jeté dans des calebasses pleines d’eau, où des femmes l’écrasent en le pétrissant avec les mains, puis le lavent à plusieurs reprises. Par cette première manipulation sont rejetés les cailloux, une grande partie du sable terreux, et des fragmens de schiste. Le résidu, transporté dans une valve de coquille, y subit de nouveaux lavages qui rejettent des parties de sable et souvent des parcelles d’or, ensuite il est réduit en poudre à l’aide d’un petit caillou. La poudre est mise à sécher au soleil, puis on souffle dessus, après quoi il ne reste plus que l’or, obtenu en paillettes et en molécules. Le métal précieux est provisoirement placé dans de petites cornes de gazelle jusqu’à ce qu’on en ait assez pour le réunir et le fondre dans un creuset, d’où il sort sous forme de torsades à vives arêtes transversales, tel qu’il est troqué dans les comptoirs du Sénégal. Les forgerons, qui sont en même temps les orfèvres du pays, en font des anneaux pour les jambes et pour les bras, des boucles d’oreilles, des colliers, des bagues, et mille objets de fantaisie. On comprend à première vue que ces procédés d’une industrie grossière laissent perdre une quantité de métal, que le chef de l’expédition de 1843, M. Huart, n’estimait pas à moins des 99 centièmes ; les terres lavées sont d’ailleurs la moindre partie de celles qui pourraient être exploitées. Les puits et les galeries, mal creusés et mal étayés, sont détruits par de fréquens éboulemens qui recouvrent pour toujours de précieuses veines. Ailleurs la présence de l’eau souterraine, que les noirs ne savent pas