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pour protéger la troque qui se faisait à l’escale dite du Coq, ainsi que la navigation du fleuve jusqu’à Bakel. Les peuplades du Fouta qu’il surveille, profitant des troubles qui suivirent la révolution de 1789, le détruisirent vers la fin du siècle dernier. Sous la nouvelle occupation française, au retour des Bourbons, jusqu’en 1854, la défense militaire du fleuve entre Saint-Louis et le pays de Galam se bornait aux postes armés de Richard Toll et de Dagana, à trente-six et quarante lieues en amont de la capitale. De ce dernier point jusqu’à Bakel, une distance de cent soixante-dix lieues était tout à fait dégarnie. De là pour nos traitans des attaques et des exactions sans nombre de la part des populations riveraines. Aux motifs qui, de tout temps, avaient justifié la création d’une place intermédiaire, se joignaient des considérations nouvelles empruntées aux convenances du temps présent. La population entassée à Saint-Louis, sur un étroit et stérile îlot, était invitée, pour la conduite de ses intérêts, à se répartir en diverses stations le long du fleuve ; une ville devait s’élever dans l’intérieur, comme succursale commerciale de Saint-Louis et centre d’opérations plus rapproché des pays producteurs.

Partie le 28 mars de Saint-Louis et transportée sur le fleuve, la colonne expéditionnaire arriva en quelques jours à Podor, et dans de vigoureux engagemens dispersa les indigènes, dont la résistance se réduisit à quelques coups de feu. Maître du terrain, le génie commença immédiatement la construction du fort, qui fut achevé au bout de quarante jours. Le résultat immédiat fut la suppression des coutumes exigées des traitans à cette escale, le gouvernement se réservant de les prélever lui-même et de les payer aux chefs maures, s’il y avait lieu de les maintenir en les modifiant. Pendant cette campagne, le cheikh des Braknas, Mohammed-Sidi, se signala par des manœuvres hostiles qui le désignèrent à la sévérité du gouverneur pour le jour où l’expiation paraîtrait opportune.

Les espérances fondées sur le rétablissement de Podor ont toutes été justifiées. Un commerce actif ne tarda pas à s’y organiser ; des maisons se sont élevées sous la protection du fort ; des jardins ont été tracés et cultivés ; les parties du Fouta les plus voisines, entre autres la région du Toro et celle de Dimar, ont été depuis lors maintenues dans l’ordre par le double mobile de leur sécurité et des profits que leur procuré la troque régulière dans la nouvelle ville. La confiance s’y est développée au point que des terrains à bâtir ont pu être mis en vente aux enchères publiques, au lieu d’être concédés gratuitement, dès la fin de 1857.

Au mois de novembre 1854, M. Protet fut remplacé comme gouverneur par M. Faidherbe, chef de bataillon du génie. Cet officier, jeune encore, car il est né en 1818, apportait au Sénégal l’expérience