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la flexion des tiges des végétaux, sur la nutrition des plantes, sur la formation de la matière verte des feuilles, l’action des divers rayons colorés sur les métamorphoses des œufs de certains animaux, sur le développement des vers et la respiration des grenouilles. Ces faits suffisent pour inaugurer une belle série de recherches destinées à éclairer un jour les mystérieuses relations qui unissent le monde organique au monde inorganique.

Tels sont les principaux résultats du mouvement scientifique que l’ouvrage de M. Grove nous a conduit à examiner. On en saisira plus nettement la portée, si nous terminons cet exposé par un aperçu des élémens que peuvent offrir les recherches nouvelles, appliquées à la nature de la matière en général, et par conséquent à la métaphysique. Tous les phénomènes physiques sont, avons-nous vu, reliés dans leur infinie diversité par un caractère commun. Ils doivent tous être attribués à un état particulier de mouvement dans les molécules qui composent les corps. Les forces qui président à la production de ces mouvemens, se propageant sans fin d’une extrémité à l’autre de l’univers, se transforment suivant les résistances qu’elles rencontrent, et nous deviennent sensibles sous forme de chaleur, de lumière, d’électricité, de pesanteur. Si nous envisageons idéalement une molécule corporelle, il est évident que nous pouvons dans notre pensée l’animer d’une infinité de mouvemens différens, rotations, translations, ou rotations et translations combinées. Or nous savons qu’une pareille espèce de mouvemens moléculaires se révèle à nos sens sous la forme d’une certaine perception, et nous fait connaître une propriété particulière de la matière. En traduisant le langage scientifique en langage philosophique, on pourra donc dire que toutes les manifestations physiques doivent être attribuées aux mouvemens divers d’une substance qu’on pourra, si l’on veut, supposer unique. L’impossibilité où nous sommes rationnellement d’assigner une limite au nombre de tels mouvemens nous force d’admettre que les propriétés de la matière, prise dans son ensemble et le sens le plus absolu, doivent être en nombre infini. Si nous n’en percevons qu’une quantité restreinte, c’est parce que nous avons très peu de sens, que ceux mêmes que nous possédons sont imparfaits, et nous laissent embrasser un champ d’observations très limité.

Quelle est donc cette substance dont le mouvement éternel entretient la chaleur et la lumière du monde, le jeu des affinités chimiques, le magnétisme, l’électricité ? Faut-il, comme la plupart des physiciens, concevoir dans la matière une sorte de dualité, en supposant que chaque corps soit composé de molécules pesantes séparées, et qu’entre elles se meuve un fluide impondérable, l’éther, véhicule de tous les phénomènes physiques ? Pourquoi cependant