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même bienfait. Ce serait en effet encourager le vagabondage que de lui assurer à la fois une alimentation quotidienne et le bénéfice de l’éducation la plus fructueuse, tandis que les enfans qui appartiennent à des parens honnêtes ne pourraient prétendre qu’aux avantages assez restreints de l’enseignement primaire. Les écoles populaires de la Grande-Bretagne deviendront donc en général des ateliers d’apprentissage. Il en résultera dans les villes un encombrement d’ouvriers qui devra faire modifier le système d’éducation adopté jusqu’ici. Une grande partie de ces institutions urbaines devra être remplacée par des écoles d’agriculture telles qu’il en existe déjà. La métropole a trop d’artisans, et les colonies réclament surtout des cultivateurs. Le sentiment de ce besoin se révèle dans le vif intérêt que l’Angleterre prend à notre établissement de Mettray. Beaucoup d’Anglais en font le but spécial d’un voyage en France, et il n’y a pas dans la Grande-Bretagne de noms plus populaires et plus respectés que ceux de MM. de Courteille et de Metz.

Pour comprendre l’importance que les classes éclairées de l’Angleterre attachent à ces établissemens fondés et entretenus par elles, il faut se rappeler qu’elles ont déjà à leur charge, pour les trois quarts des dépenses, les écoles nationales, qui sont celles de l’église anglicane, les écoles britanniques, qui sont celles des communautés dissidentes, les écoles des manufactures, que les grandes usines sont obligées d’ouvrir aux enfans de leurs ouvriers, les petites écoles paroissiales, dirigées par les pasteurs, etc., sans compter les hôpitaux, les refuges, les asiles ouverts à chaque espèce de maladie et de misère, et enfin les reformatories d’adultes, fondations nouvelles dont nous parlerons ailleurs. C’est à tant de sacrifices volontaires que l’aristocratie, la gentry et les classes moyennes n’hésitent pas à ajouter les dépenses des ragged schools, des reformatories d’enfans, des écoles industrielles et des écoles d’agriculture, immense réseau qui ne laisse pas un seul enfant pauvre en dehors de l’action combinée de la charité privée et de l’assistance publique. Le gouvernement est trop intéressé au succès de ces institutions pour ne pas y concourir de tous ses moyens; mais en général les fondateurs ne sollicitent pas son assistance, parce qu’elle implique toujours une intervention qui les gêne, et beaucoup d’établissemens, ceux de Field-Lane entre autres, aiment mieux se passer des secours administratifs que de les acheter au prix de la moindre part de leur liberté d’action.

Cependant les droits de l’état sur les écoles auxquelles il confie l’enfant frappé par la loi étaient trop évidens pour qu’on pût les contester. On a présenté, dans le courant de l’avant-dernière session, un bill qui autorise les magistrats à donner aux reformatories des