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milieu de la génération actuelle. La domestication de l’autruche avait été signalée par plusieurs auteurs,-notamment par le docteur Gosse de Genève, comme possible et devant être avantageuse; malheureusement tous les essais entrepris jusqu’à ce jour avaient échoué soit au Muséum d’histoire naturelle à Paris, soit dans d’autres établissemens du midi de la France. M. Isidore Geoffroy Saint-Hilaire, qui s’intéresse si vivement à l’acclimatation des animaux utiles, avait été lui-même découragé par tant d’insuccès; il s’était borné, en dressant sa liste des espèces dont la domestication lui semblait possible et avantageuse, à désigner comme futurs oiseaux de boucherie l’autruche d’Amérique, qui se reproduisait effectivement à l’état de domesticité en Angleterre, et le casoard australien, dont M. Florent-Prévôt avait obtenu la reproduction en France. Le doute en ce qui touche la domestication de l’autruche n’est plus permis. Dans des circonstances judicieusement réunies, M. Hardy a pu mener à bonne fin deux couvées, et il montre actuellement les treize jeunes autruches de l’Hamma dans un parfait état de développement rapide. Grâce aux encouragemens de l’administration, il y a lieu de croire qu’on passera bientôt de cette heureuse expérience à une utile pratique.

Nous n’avons plus à parler des productions du sol algérien que dans leurs rapports avec l’état de nos propres récoltes, et c’est ce qui nous décide à terminer cette étude par quelques remarques sur l’utilité toute particulière qu’offrirait un développement de la culture des plantes fourragères dans notre colonie africaine. Il y a aujourd’hui, pour l’agriculture française comme pour l’agriculture algérienne, ce qu’on pourrait appeler la question des fourrages. Le manque des plantes utilisées pour la nourriture des animaux se fera vivement sentir, en 1858, sur les deux bords de la Méditerranée. Disons un mot de la question, d’abord en ce qui touche l’Algérie, puis en ce qui intéresse la France.

Si nous commençons par nous placer en Algérie, nous verrons d’immenses prairies négligées s’arrêtant dans leur végétation sous l’influence d’un soleil ardent. Dépourvues de cultures fourragères appropriées au climat, les fermes ne peuvent entretenir les animaux nécessaires à leur exploitation. En voyant les immenses troupeaux dispersés sur nos steppes africains, on aime à croire cependant qu’un jour viendra où, mieux alimentés de fourrages plus nutritifs et sans parcourir d’aussi grandes distances, ils ajouteront aux approvisionnemens de grains, de fruits et de légumes obtenus d’un fertile territoire, le complément des produits animaux qui manquent en France, soit pour assurer une alimentation plus forte et salubre à la population, soit pour fournir des élémens de travail aux im-