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sentées sur les vins, nous pourrions les reproduire à propos des huiles d’olive. Les faits qui se sont manifestés à l’exposition dernière sont du même ordre. Le sol, le climat, les espèces cultivées, tout est favorable au développement comme à la maturation des fruits de l’olivier, qui atteint en Algérie les proportions de nos arbres de haute futaie. La Kabylie notamment est couverte de cette précieuse essence. Depuis 1852, le commerce des huiles a pris une extension considérable[1]. Et cependant le plus grand nombre des échantillons d’huiles venus de différentes localités offraient une couleur terne, une odeur désagréable et un goût notablement rance. Hâtons-nous d’ajouter que parmi ces produits des cultures et de l’industrie algérienne il s’en est trouvé un, provenant du moulin Roche à Dalmatie, dont la couleur légèrement ambrée, la transparence, l’odeur douce et le goût suave ne laissaient rien à désirer. Pourquoi donc n’obtient-on pas, partout où les circonstances locales sont sensiblement les mêmes, des résultats aussi favorables? A cet égard, il ne nous reste aucun doute : c’est surtout parce que les procédés lents et défectueux de macération et de trituration des fruits, de pressurage et de conservation des huiles, laissent graduellement les olives et les pulpes en proie à l’action des fermens spéciaux, spontanément développés, qui déterminent graduellement des réactions défavorables, — une putréfaction sensible des principes immédiats contenus dans le péricarpe charnu, le dédoublement partiel des substances grasses en glycérine et principes huileux acides, enfin cette rancidité inévitable, lorsqu’on laisse exposés à l’air, sur de larges superficies mal nettoyées, les corps gras en présence de l’humidité et sous l’influence d’une température atmosphérique élevée. Lorsqu’on le voudra, il sera très facile de substituer à ce fâcheux état de choses les procédés de nos huileries perfectionnées, et d’obtenir alors des huiles comestibles de qualité irréprochable. Peut-être cependant les meilleures huiles préparées dans l’Afrique française ne pourront-elles jamais offrir cette exquise délicatesse de goût qui distingue les huiles de Provence. C’est que tous les efforts de l’industrie ne peuvent suppléer au développement de certains arômes légers propres aux produits récoltés sous des climats doux, et qu’on ne retrouve guère au-delà des frontières de l’ancienne France continentale. Il en est des qualités supérieures des huiles comestibles comme des arômes qui constituent les bouquets variés nos vins, de nos eaux-de-vie de table, la suavité des odeurs de nos eaux distillées aromatiques, le goût délicat de nos fruits : ces

  1. Les exportations cette année se sont élevées à plus de 4 millions de kilos. Le commerce général d’exportation s’est exercé en 1856 sur 5,612,820 kilos, dont la valeur s’élevait à 10,103,076 fr., et pour les huiles de graines, à 8,839,346 kil., valant 12,817,032 fr.