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L’arrangement qu’on vient de prendre a été accepté provisoirement par l’Allemagne, mais il ne semble pas, disions-nous, devoir être définitif. Nous ne pensons pas qu’un autre expédient puisse couper court à toutes les difficultés dont se compose cette malheureuse question danoise que celui qui consiste à laisser l’Allemagne briser elle-même le heelstat, ou état d’ensemble, machine monstrueuse qui ne saurait manœuvrer, et à y substituer un état d’union garantissant au Danemark jusqu’à l’Eider, c’est-à-dire y compris le Slesvig, l’unité politique, les duchés de Holstein et de Lauenbourg restant annexés par un lien tout personnel et non pas réel. Encore une fois, c’est la position du grand-duché de Luxembourg vis-à-vis de la Hollande que nous voudrions voir établir ici d’une façon durable, et nous cherchons en vain lequel des deux partis aurait à se plaindre, les droits réciproques étant de la sorte, à ce qu’il semble, parfaitement respectés. C’est à peine si le heelstat eût été praticable dans le cas où la confédération n’aurait aperçu au-delà des frontières du Holstein aucun envahissement à rêver. Le duché de Limbourg reste bien, il est vrai, réuni au royaume de Hollande, sous la même constitution et la même législation, tout en faisant partie de la confédération germanique, et sans qu’il en résulte aucun désordre. Toutefois un tel arrangement ne laisse pas d’être perfide. C’est parce que la confédération n’entrevoit pas derrière le Limbourg, entre le Limbourg et le royaume de Hollande, quelque Slesvig à gagner, que la paix subsiste; mais qui l’empêchera d’exiger un beau jour que la constitution du Limbourg, duché allemand au même titre que le Holstein et le Luxembourg, soit révisée? C’est son droit; mais en même temps elle se sera ingérée, si on la laisse faire, dans la constitution intérieure et particulière du royaume de Hollande, et, par le fait même de son intrusion, elle aura porté atteinte à son indépendance au gré du caprice ou de l’ambition des Allemands. En présence d’un tel danger, les états-généraux de La Haye ne seront-ils pas bien venus à répondre qu’ils entendent maintenir dans son intégrité une constitution garantie par les puissances européennes, et à repousser toute intervention étrangère dans la législation constitutionnelle et administrative de leur monarchie? On dira que c’est refuser à la confédération son droit légitime de protection sur un duché qui dépend d’elle : peut-être bien; la faute en est à cette vicieuse organisation.

Il y a d’ailleurs bien d’autres dangers qu’elle entraîne avec elle. Que dire par exemple de la situation bizarre dans laquelle se fût trouvé le souverain de la monarchie danoise pendant la dernière guerre contre la Russie, dans le cas, qui a failli se présenter, où, se déclarant de concert avec la Suède et la Norvège pour les puis-