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fils, droits que le fameux principe de l’intégrité étendra à toute la monarchie. Nous avons trop souvent exposé toutes ces conséquences, dont quelques-unes se sont déjà réalisées, et nous voulons nous borner ici à suivre les progrès des envahissemens sans cesse médités par l’Allemagne au détriment de la monarchie danoise.

Nous avons déjà noté la condition imposée au Danemark de ne pas étendre au Slesvig la constitution du 19 juin 1849. En premier lieu, cette constitution est libérale, et comme telle déplaît à la confédération. En second lieu, isoler le Slesvig du Danemark est chose désirable pour aider à l’exécution du plan qu’on s’est tracé. De plus nous avons dit que l’ancien régime des états provinciaux, forme de l’absolutisme tel qu’il existait avant les changemens opérés dans le reste du Danemark, avait dû être conservé en Slesvig comme en Holstein, où la confédération avait tout le droit possible de travailler à le maintenir, et nous avons remarqué que cette conformité d’institutions était perfide, qu’il eût été de l’intérêt du Danemark d’empêcher tout ce qui pouvait rapprocher et contribuer à réunir les deux duchés, ligués naguère sous une inspiration venue de l’étranger et dans une rébellion commune. Qu’on ajoute à cela les divers épisodes qui ont mis à découvert les secrètes visées de la confédération; qu’on se rappelle par exemple M. Le baron Blome exprimant, dans l’assemblée des états holsteinois du mois d’août 1857, la prétention de faire donner dans le conseil commun de toute la monarchie un nombre égal de membres à la représentation du Danemark proprement dit et à celle des trois duchés confondus et mêlés ensemble, et on touchera du doigt l’espérance que nourrit l’Allemagne, celle de parvenir à accaparer de nouveau le Slesvig. C’est là le vrai péril, on ne doit pas s’y tromper. L’Allemagne a sans cesse refusé de préciser ses griefs pour dissimuler ce but extrême; elle a sans cesse exigé de nouvelles concessions, prenant acte de chacune et la déclarant toujours insuffisante. Il est telle de ces concessions cependant dont elle se contenterait assurément, celle par exemple que demandait M. Blome. Une fois l’égalité des deux représentations accordée, il ne faudrait plus que l’émigration de quelques délégués prussiens venant acquérir des domaines en Slesvig (comme on a vu M. de K….. le faire en Lauenbourg), se faisant ensuite élire à l’assemblée générale de la monarchie commune, et l’emportant bientôt d’une ou deux voix sur l’ancienne majorité danoise. On conçoit que tout serait promptement changé, et que le Danemark deviendrait bientôt une annexe allemande.

L’Allemagne ne manque pas d’ailleurs d’érudits et de professeurs d’histoire pour soutenir que le Slesvig est terre primitivement allemande, usurpée par cette formidable civilisation danoise qui a fait