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L’HOMME DE NEIGE

cinquième partie.[1]

VIII.

Christian avait attentivement écouté le récit de l’avocat. — Il y a là pour moi bien du louche, dit-il après avoir réfléchi quelques instans. Je plains cette pauvre baronne Hilda, et de tous les personnages de ce drame, elle est celui qui m’intéresse le plus. Qui sait si, comme quelques-uns le prétendent, elle ne serait pas morte de faim dans cette horrible chambre ?

— Oh ! cela n’est point ! s’écria M. Goefle. On me l’avait tant dit que je m’en suis tourmenté l’esprit ; mais Stenson, qui ne l’eût certes pas souffert, m’a donné sa parole d’honneur qu’il n’avait pas cessé de servir et de soigner la baronne, et qu’il avait assisté à ses derniers momens. Elle est bien morte d’étisie en effet, mais son estomac se refusait à la nourriture, et le baron n’a rien épargné pour qu’on satisfît tous ses désirs.

— Oui, au fait ! reprit Christian ; si l’homme est habile comme le dépeint votre récit, il n’aura pas voulu commettre un meurtre inutile. Il lui aura bien suffi de tuer cette pauvre femme par la peur ou par le chagrin. Cependant une autre version, monsieur Goefle, ma version à moi !…

— Voyons.

— C’est qu’elle n’est peut-être pas morte.

  1. Voyez les livraisons du 1er et 15 juin, du 1er et 15 juillet.