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brève analyse, les opinions exprimées sur chacune de ces graves matières. Il suffit de les énumérer pour signaler l’intérêt qu’elles présentent au temps où nous sommes, alors qu’un grand essor est imprimé de toutes parts aux travaux publics ; particulièrement aux chemins de fer, alors surtout que les divers gouvernemens d’Europe portent de plus en plus leur sollicitude vers l’examen des moyens pratiques à l’aide desquels il serait possible de régulariser l’industrie. À la suite des révolutions que nous avons traversées, l’économie politique n’a plus à craindre que, sous prétexte qu’elle serait peu divertissante, on dédaigne ses enseignemens et sa recherche incessante des lois qui gouvernent le monde matériel. Le bon marché, par exemple, qui occupe une grande place dans le Cours de M. Michel Chevalier, tient-il une place moindre dans nos idées, dans nos besoins de chaque jour ? Où réside-t-il ? Quels sont ses élémens ? Comment y arriver sans secousses et sans périls ? M. Chevalier a bien raison de dire que c’est Jaune question vitale pour la société moderne. À certaines heures, le bon marché, le vrai bon marché, est une condition de vie ou de mort pour un gouvernement. Lors même que l’on ne croirait point devoir adhérer complètement à toutes les propositions du savant économiste (et en faisant cette réserve nous avons en vue les conséquences, exagérées suivant nous, que M. Chevalier tire de l’application du principe de la concurrence universelle), on ne saurait lui contester le mérite d’avoir très clairement exposé le problème et fourni de nombreux élémens pour la solution. Il ne faut pas croire d’ailleurs que ses préoccupations au sujet des intérêts matériels le laissent étranger ou indifférent aux questions morales. M. Michel Chevalier a toujours su parfaitement saisir, pour sa part, le rôle considérable que l’économie politique est appelée à remplir dans ces domaines supérieurs, où elle est digne d’avoir accès. Outre de nombreuses preuves qui établissent les nobles affinités de la science qu’il professe, son Cours renferme une démonstration souvent éloquente de l’influence qu’elle exerce dans l’ordre moral comme dans l’ordre des intérêts purement matériels. C’est par de semblables travaux que l’économie politique continuera1 à s’affirmer comme science et à s’honorer.


C. LAVOLLEE


ESSAI HISTORIQUE SUR LES ENFANS NATURELS, par M. Fernand Desportes.[1]

Le sujet traité dans ce livre intéresse à la fois l’historien, le jurisconsulte et le législateur. L’auteur commence par développer les phases diverses de la condition des enfans naturels dans les temps anciens et modernes ; il expose ensuite avec sagacité la législation que leur applique le code civil, et il recherche librement les réformes que les incertitudes de la jurisprudence, les obscurités ou les imperfections de la loi peuvent rendre nécessaires.

La constitution de la famille dans le droit romain, les efforts successifs de la philosophie stoïcienne et de la religion chrétienne pour faire passer dans la législation les droits de l’humanité en les combinant avec les exigences de l’ordre public, ont été pour M. Desportes l’objet de curieuses recherches, et, tout en dénonçant des alternatives de faiblesse et d’intolérance, l’auteur a signalé avec raison diverses tentatives dont l’effet, dû en partie au christianisme, fut la légitimation des enfans naturels par le mariage

  1. In-8°, Auguste Durand.