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a-t-il rien dans ce langage qui ne soit conforme aux résolutions annoncées dans la grande assemblée d’Autun ? Évidemment Vercingétorix ignorait la présence des auxiliaires germains, ou il se faisait illusion sur leur nombre et leur valeur. Il ne comptait pour rien l’insignifiante cavalerie qui accompagnait César un mois plus tôt. Il croit n’avoir affaire qu’à l’infanterie des légions. Il sait combien elle est redoutable, mais, embarrassée qu’elle est de bagage, il espère la condamner à une immobilité fatale ou à une retraite qui aurait ressemblé à celle de 1812, car lui aussi avait ses Cosaques. C’est du reste ce que César fit depuis en Catalogne avec cette même cavalerie gauloise, et aussi contre des vétérans romains. Les dispositions prises sur le terrain par le héros arverne répondent à la pensée que nous lui prêtons.

Il met son infanterie en bataille devant son camp, au bord d’un fleuve, non pour l’engager, mais pour en imposer à l’ennemi et encourager les siens. Il lance en avant sa cavalerie divisée en trois corps, l’un dirigé contre la tête de colonne de l’armée romaine, les deux autres destinés à l’assaillir sur ses flancs. Mais quel dut être l’étonnement des Gaulois en voyant l’ennemi, non pas se resserrer pour recevoir leur choc et couvrir ses bagages, mais ouvrir ses rangs à une nombreuse et belle cavalerie, qui, divisée aussi en trois corps, s’avance à son tour vers eux ! Le courage au moins ne manquait pas à nos pères : ils acceptèrent bravement le combat tel qu’on le leur offrait et le soutinrent quelque temps avec des chances diverses. César ne nous en donne pas les détails. Il se borne à dire qu’après avoir arrêté sa colonne et pris les dispositions nécessaires pour la sûreté des impedimenta, il manœuvra avec les légions et leur fit exécuter plusieurs changemens de front pour appuyer ses auxiliaires et réparer leurs échecs partiels. Sans que l’épée romaine sortît du fourreau, ce fut la tactique romaine et le coup d’œil du grand capitaine qui cette fois encore décidèrent de la victoire. Au bout de quelques heures, la droite de la cavalerie gauloise était poussée en désordre jusqu’au fleuve où était restée l’infanterie ; le centre et la gauche, se voyant tournés, se mettaient à leur tour en déroute. Vercingétorix ne semble pas avoir tenté d’arrêter les fuyards ni de changer la fortune de la journée ; tout ce qu’il put faire fut de couvrir tant bien que mal la retraite. Son arrière-garde fut entamée, mais il parvint à lever son camp et à sauver ses bagages. César le suivit jusqu’à la nuit. Le lendemain, les troupes romaines se remirent en marche sur les traces de l’ennemi, et se trouvèrent bientôt en face de l’armée gauloise ralliée et déjà retranchée sur une belle position que dominait la ville mandubienne d’Alesia. César la reconnut ; une attaque de vive force était impossible. Sans se laisser intimider par le nombre