lequel les Monténégrins acceptent toutes les charges établies dans un intérêt public indique assez combien les efforts civilisateurs du prince sont secondés par le bon esprit et le patriotisme de son peuple. Les instincts nationaux appellent le progrès et peuvent se plier à toutes les exigences de la civilisation.
Nous avons conduit l’histoire du prince Danilo jusqu’à la limite des derniers événemens ; nous ne la franchirons pas. La nouvelle agression des Turcs et la victoire des Monténégrins à Grahovo sont des faits assez nouveaux et qui ont eu assez de retentissement pour qu’il suffise de les mentionner. L’insurrection de l’Herzégovine a servi de prétexte à l’invasion des Turcs. On a beaucoup parlé de cette insurrection ; on peut aujourd’hui en marquer le vrai caractère. C’était une insurrection locale et communale. Les divers villages se sont soulevés successivement et sans aucune entente préalable. Le Monténégro a-t-il provoqué cette insurrection ? Le bon sens et les faits nous autorisent à le nier. Des insurgés qui obéissent à l’action d’un gouvernement, fût-ce celui de la plus petite principauté, agissent avec plus d’ensemble. Il n’y a eu excitation ni du Monténégro ni de personne ; il y a eu seulement une série de résistances individuelles, spontanées, ayant leur cause première dans l’état déplorable du pays, mais que les bachi-bouzouks seuls ont fait éclater. Une répression aveugle a seule pu donner un corps, un ensemble à ces résistances. Non-seulement Danilo n’a pas fomenté l’insurrection, mais même il n’y a pris une part directe et active qu’à la dernière heure, forcé de le faire pour repousser l’agression turque. Nous ne prétendons point qu’aucun Monténégrin n’ait donné aide à ses voisins contre les Turcs, qu’il n’y ait pas eu des actions où des partis de Monténégrins se soient trouvés engagés ; ce qu’il suffit d’établir, c’est que le Monténégro, comme état, comme gouvernement, est resté en dehors de la lutte, que son rôle a été purement défensif jusqu’à la dernière extrémité. L’expectative était en effet la politique indiquée du prince Danilo ; il devait regarder le soulèvement comme inopportun, parce qu’il contrariait ses vues, ses projets. Le prince espère moins de la force que de l’action diplomatique des puissances. Son ambition est de devenir le chef d’un état organisé et reconnu. L’insurrection des chrétiens l’a surpris au milieu de ses réformes. S’il avait travaillé à l’organiser, elle aurait eu ce qui lui a manqué, une tête, un chef ; alors elle aurait pu prendre sur-le-champ des proportions formidables. On n’en doutera pas en comparant l’énergie qu’ont déployée tout récemment les Monténégrins et la faiblesse des forces dont disposaient primitivement les Turcs.
Vers la fin de janvier 1858, les Turcs les premiers, comme de