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pouvoir puiser dans le rapport de la commission les élémens d’un historique de la législation douanière qu’elle publia en 1838. J’ai tenté à mon tour de me servir des documens réunis avec tant de soin par M. Grar dans sa remarquable histoire de l’industrie houillère du nord de la France, et aussi d’un curieux recueil, manuscrit pour la plus grande partie, qui appartient à la bibliothèque du ministère de l’intérieur[1]. On possède ainsi à peu près tous les matériaux nécessaires à l’étude des régimes successivement adoptés pour résoudre le grave problème économique qui doit concilier les intérêts des producteurs et des consommateurs de houille.

L’enquête de 1832 ne s’est pas terminée sans résultat pratique, comme celle de 1828 ; elle a eu des conséquences directes et indirectes de la plus haute importance. Il fut reconnu que les prix d’extraction de la houille étaient, à quelques centimes près, semblables en Angleterre, en Belgique et en France, et le gouvernement n’hésita plus à tenter une réforme partielle par une série d’actes auxquels la consécration législative fut donnée par la loi du 2 juillet 1836. C’est à cette même enquête de 1832 qu’il faut attribuer la faveur accordée, depuis 1834, aux bâtimens à vapeur de notre marine, militaire ou civile, qui peuvent se servir des houilles étrangères sous la seule condition de payer un droit de balance de 15 centimes, pourvu qu’ils ne remontent pas les fleuves au-delà du dernier bureau de douane. Dix ans après, l’agitation houillère s’était renouvelée. Dans sa session de 1846, le conseil du commerce émettait le vœu formel de l’admission en franchise, par toutes les frontières, des combustibles minéraux venant de l’étranger, et subsidiairement réclamait avec instance la suppression des zones, qui, selon lui, n’aboutissaient qu’à créer de choquantes inégalités, notamment sur les divers points du littoral. À la suite de ce mouvement, qui a été étudié ici même par M. Charles Coquelin[2], et qui n’avait pas seulement trait à la houille, un projet de loi sur les douanes avait été présenté à la chambre des députés ; il était devenu l’objet d’un long rapport de M. Lasnier, qui avait représenté notre industrie minérale comme incapable de lutter contre l’invasion des produits de l’Angleterre et de la Belgique. La révolution de février avait naturellement empêché qu’il fût donné aucune suite à ce projet, et jusqu’en 1852 l’état de l’industrie rendait inutile toute querelle douanière ; mais lorsque l’année suivante nos manufactures prirent cet élan extraordinaire où l’augmentation forcée du

  1. Recueil historique et alphabétique sur l’exploitation des mines de charbon de terre et de houille, avec les dispositions concernant les droits, par M. Bruyard, premier commis de M. Trudaine, 2 vol. in-4o, 1756-1760.
  2. La Liberté du commerce et les Systèmes de douanes, — les Houilles et les Fers, livraison du 15 janvier 1847.