Il semble que tout soit dit maintenant sur la guerre de Crimée, et qu’une relation de la bataille d’Inkerman ne puisse rien apprendre de nouveau. Nous n’avons pas à revenir en effet sur l’ensemble des opérations militaires qui se rattachent au siège de Sébastopol ; mais il n’en est pas de même de la bataille d’Inkerman, objet de versions contradictoires qui font encore aujourd’hui de cette grande action militaire un problème historique difficile à résoudre. La version anglaise seule nous a été connue pendant longtemps. On se souvient de l’impression que laissèrent en France les premières nouvelles de cet événement : la victoire remportée par les alliés nous semblait surtout glorieuse pour les armes des Anglais, qui, réduits à une poignée d’hommes, avaient, disait-on, supporté seuls tout l’effort des Russes. L’imagination était vivement frappée de l’inégalité de cette lutte et des circonstances dramatiques qui l’avaient signalée, s’il fallait en croire les relations publiées par le Times et le Morning-Herald, les lettres des officiers anglais, celles même de Français enthousiastes qui, sans y prendre autrement garde, se faisaient en tout leur écho.
Suivant ces récits, les alliés se disposaient à donner un assaut décisif, quand le 5 novembre 1854, à la pointe du jour, les Anglais