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chinoise des fils, des tissus, du papier. Or les produits de ce genre n’ont de valeur qu’autant qu’il entre dans leur composition de véritables fibres textiles très souples et tenaces, semblables en un mot à celles du lin, du chanvre, et en seconde ligne du coton. Aucun élément organique comparable à ceux-ci ne se rencontre dans les tiges du sorgho : on y trouve seulement des faisceaux rigides, des fibres ligneuses et une sorte de parenchyme ou tissu cellulaire propres tout au plus à être employés dans la confection d’un carton grossier.

Les graines de cette plante pourront entrer probablement avec avantage dans les rations alimentaires des animaux, pourvu que la dessiccation en ait été faite avec soin, et que le prix de revient, ce qui est probable, soit inférieur au cours du seigle et de l’orge. Il serait impossible de se former aujourd’hui une opinion sur la valeur, bien faible selon toute apparence, de la paille de sorgho, signalée comme très propre à la confection de jolis ouvrages à la main. Quant aux principes colorans de la graine, ils existent en effet, mais n’ont pu encore être soumis aux essais d’application à la teinture et de résistance à la lumière et aux autres agens atmosphériques, essais qui seuls pourront en fixer l’utilité.

De tout le brillant avenir présagé à cette plante remarquable, mais encore incomplètement étudiée, il ne reste donc guère de très probable que son emploi économique comme fourrage dans le midi, l’ouest et le centre de la France. Sa croissance rapide, son énorme production, qui, à l’aide d’engrais et d’irrigations, atteindra facilement sans doute et dépassera peut-être 80,000 kilos par hectare de superficie cultivée, promettent d’abondantes et utiles ressources pour l’élevage et l’entretien du bétail. La plante nouvelle rendrait ainsi les plus grands services aux contrées mêmes où la culture en est le plus facile, et où la production animale est insuffisante pour subvenir aux besoins et concourir aux approvisionnemens de la population.

On peut admettre avec M. Dupeyrat que le sorgho donnera par hectare 100,000 kilos de fourrage, qu’après avoir mis à profit pour la nourriture des animaux les rejets de chaque touffe pendant la croissance des tiges principales, celles-ci, récoltées à l’époque de leur maturité, puis découpées en rondelles peu épaisses au coupe-racines et saupoudrées de son ou de remoulage, seront plus facilement consommées et plus nourrissantes. On obtiendrait ainsi d’une prairie cultivée en sorgho le quintuple d’une prairie à surface égale cultivée en foin, et si l’on n’attendait pas la maturité complète de la graine, celle-ci, laissée dans le fourrage, accroîtrait sa faculté nutritive. Bien que l’on parvînt de cette façon à prolonger la durée de la