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les montagnes et les plateaux qui avoisinent Salins, nous ne voyons pas que ni les unes ni les autres aient encore produit un résultat bien décisif. Alise a donné des antiquités romaines et mérovingiennes, des fragmens d’inscriptions et quelques monnaies qui paraissent d’origine celtique. Alaise oppose de nombreux débris d’un caractère assez vague, des traces de fossés et de murs, des sépultures germaines ou Scandinaves. Mais personne ne conteste qu’il ait existé une grande ville sur le Mont-Auxois. D’autre part nul n’ignore que la Franche-Comté a été, à bien des époques, le théâtre de guerres sanglantes, que bien des ruines diverses doivent se rencontrer sur son sol. C’est dans ce pays même que César avait déjà fait une de ses premières campagnes, et ce fut une des plus importantes, car son armée n’était pas encore aguerrie, et il s’agissait d’arrêter les invasions germaines, de repousser au-delà du Rhin ces tribus vaillantes et robustes, ces colosses dont l’aspect frappait de terreur les compagnons du proconsul. N’était-ce pas là la véritable guerre séquane que Varron chantait dans son poème aujourd’hui perdu, et les tumuli du plateau d’Amancey ne renferment-ils pas les restes de quelques guerriers d’Arioviste ? Hâtons-nous de le dire, si nous n’estimons pas ces découvertes archéologiques à leur juste valeur, c’est que nous ne sommes pas en mesure de les apprécier ; aussi nous en rapportons-nous au jugement de l’autorité la plus grave en matière d’érudition, l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres. Or cette illustre compagnie a couronné le mémoire de M. Rossignol et semble avoir reconnu ainsi que les Mandubiens n’appartenaient pas à la confédération séquane, qu’Alesia ne s’élevait pas sur un contre-fort du Jura. Nous ne voudrions pourtant pas exagérer l’importance que l’Académie elle-même attache peut-être à cette décision : l’arrêt sans doute n’est pas irrévocable ; mais jusqu’à plus ample informé, il reste permis de croire que le Mont-Auxois conserve tous ses droits à représenter le dernier boulevard de l’indépendance gauloise.

Jusqu’à plus ample informé, avons-nous dit, car les travaux d’exploration continuent fort activement en Franche-Comté. Un savant professeur, M. Desjardins, a déjà rendu à l’Académie un compte sommaire d’une excursion qu’il a faite de ce côté ; il annonce un mémoire ; M. Quicherat, qui s’est aussi rendu sur les lieux, va en publier un autre[1]. On attend une seconde édition du travail de

  1. Ce mémoire a paru. C’est celui auquel nous avons déjà fait allusion dans quelques notes ajoutées après coup. M. Quicherat établit que le massif d’Alaise « nous offre un des plus grands oppidum celtiques qu’on ait signalés et incontestablement le mieux conservé de tous. » Nous ne le contestons pas. Est-ce bien l’oppidum que Vercingétorix a défendu contre César ? La démonstration ne nous parait pas aussi concluante. Il est possible que la vue des lieux laisse dans l’esprit une impression tout autre que l’inspection de la carte. Nous avons pourtant quelque peine à le croire. Quand on sait par